donnez-leur vous-mêmes à manger

L’Évangile dans un paradis en ruines

Chaîne du Caucase en Abkhazie

“À cause des pauvres qui sont opprimés et des malheureux qui vont gémissant, maintenant, moi, l’Éternel, j’interviens pour accorder le salut à ceux qui sont méprisés” (Ps 12.6)

Dieu se lève et sauve ceux qui aspirent à son salut, encore de nos jours et dans des endroits où cela semble impossible, comme en Abkhazie.

L’Abkhazie se situe dans le Caucase, à plus de 3000 km à vol d’oiseau de la France. Sa longue histoire remonte jusqu'aux Grecs et aux Romains. Au Nord, des montagnes de 4000 m la séparent de la Russie et alimentent de nombreux fleuves qui se jettent dans la Mer Noire, au Sud. Outre ces montagnes on trouve aussi des plaines fertiles au climat subtropical. Le seul point d’accès au pays par voie terrestre se trouve près de la ville russe de Sotchi, mais, pour passer la douane, il faut compter des files d’attente de 3 à 4 heures, par 35-40° C !

Une grande détresse

Bananeraies

Du temps de l’Union soviétique le pays accueillait un grand nombre de touristes. On cultivait le thé, des bananes, des épices, des oranges, des kiwis, des kakis et bien d’autres fruits. Comme au paradis, pourrait-on croire ! En fait on s’aperçoit vite qu’il s’en faut de beaucoup !

Aujourd'hui, les gens ne peuvent plus exporter leur production et la majorité des récoltes se perd, à part ce qu’achètent les rares touristes russes. Les prix bas ne suffisent pas à les attirer, la sécurité est incertaine, tout se délabre et la pauvreté augmente. En dehors des produits agricoles, tout est cher, parce qu’importé de Russie. Les gens perçoivent 30 € de retraite mensuelle, s’ils en ont une !

Au 19e siècle beaucoup d’Abkhazes ont fui en Turquie devant la mainmise du tsar russe et se sont convertis à l’Islam. Actuellement, le pays n’a plus que 240 000 habitants, contre 525 000 avant les guerres d’indépendance de 1992-93 et 2008 qui ont ravagé la région après l’écroulement soviétique. La moitié sont morts ou ont fui ; beaucoup de ceux qui restent sont devenus très pauvres. Heureusement qu’il fait chaud la plupart du temps, mais l’hiver est froid, surtout sur les hauteurs.

Traces de la guerre des années 90

Dans cet ancien “paradis”, devenu un quasi-enfer, on trouve désormais partout des terrains en friche et des maisons endommagées proposées à la location ou à la vente . À côté d’une maison se dresse souvent une hutte traditionnelle faite de pieux reliés entre eux par des tressages en saule. Au centre, il y a un foyer sur lequel on fume de la viande et du fromage.

Figure sculptée représentant le dieu de la religion primitive abkhaze.

Qui peut apaiser la soif de vérité ?

Les Abkhazes vivent en tribus fortement unies.
Les cimetières familiaux ont une grande importance. On s’y rend souvent, parfois en famille, pour un culte des ancêtres réputé permettre d’établir le contact avec l’au-delà.

C’est ainsi que resurgissent des traditions païennes, alors que le christianisme a été introduit dès l’époque romaine.

60 % des gens se disent orthodoxes, 16 % musulmans et 8 à 10 % athées.

Une partie est adepte de la religion traditionnelle abkhaze : croyance en un dieu créateur, tout-puissant, omniprésent et invisible. Il reste même des traces de l’histoire du déluge, mais elles s’estompent avec le temps.

L’Évangile est inconnu et on ne sait pas comment obtenir le pardon des péchés.
C’est ce qui rend la diffusion de la littérature chrétienne importante.

À leur porte, au bord de la rue, toutes les communautés chrétiennes mettent à disposition des passants des stands avec des Nouveaux Testaments et des brochures. Le plus souvent, il faut les réapprovisionner au bout de quelques jours.

L’église de Gudauta

Une oasis parmi les ruines

En parcourant les villes détruites, on a l’impression de tomber sur une oasis, quand on aperçoit soudain le bâtiment d’une communauté chrétienne. La croix sur la pointe du toit se voit de loin et rappelle : Dieu est plus fort que la destruction, Christ a vaincu la mort, le péché et le diable.

Pour aider les gens, il n’y a que quelques tentatives de l’État et la générosité des chrétiens. Il en était ainsi pendant la guerre des années 1990 : beaucoup de chrétiens de Sotchi sont venus distribuer des vêtements et de la nourriture. Jusque dans les sphères du gouvernement on est reconnaissant de cette aide de la part des chrétiens.

Le pays compte sept petites communautés évangéliques de 10 à 40 membres et le Seigneur est à l’œuvre. De nombreux panneaux annoncent l’Évangile du salut en Christ.

Wladimir (ancien d'Otschamira), Ivan (ancien de Sotchi) et Alena (diaconesse de Gudauta) sont très reconnaissants pour chaque fauteuil roulant qu'ils obtiennent.
Les chrétiens s'occupent avec amour des enfants handicapés à cause de la paralysie - ici dans un temps libre pour les handicapés.

Servir Dieu, c’est changer les couches...

Dans chacune des sept villes principales du pays les chrétiens ont acquis une maison quelque peu intacte et la remettent en état pour s’y réunir. À Gudauta, ils ont développé un service important en prenant soin des handicapés ; ils ont aménagé les toilettes de manière à pouvoir accueillir les personnes en chaise roulante. En effet la guerre a estropié beaucoup de gens et il n’existe presque pas de services médicaux. Ainsi bien des enfants sont atteints de polio et sont à peine ou pas du tout soignés.

Pour apporter l’Évangile aux gens, les chrétiens vont auprès des plus malheureux pour les aider ou les emmener à un culte. Il arrive parfois que celui-ci rassemble dix paralysés ou plus en chaise roulante. Là, le service le plus important ne consiste pas à chanter dans la chorale ou à prêcher, mais à changer deux ou trois fois les couches (à des adultes comme à des enfants) au cours du service ! C’est un article très coûteux qu’on réutilise trois à cinq fois... Avec la toilette et le soin des corps, cela constitue un gros travail et fait d’un culte une expérience assez inattendue – surtout s’il y a plusieurs personnes à soigner de cette manière. Les gens ainsi pris en charge sont vraiment heureux et reconnaissants. Ces marques de l’amour chrétien peuvent avoir plus d’effets qu’une prédication !

Les chrétiens de la région ne se laissent pas décourager, tel Dimitri qui dirige un Centre Social Chrétien. Sa femme est en chaise roulante depuis un accident et ils ont un fils de presque deux ans. Il a même construit un ascenseur pour chaises roulantes. Quand on lui demande si sa vie n’est pas trop dure, il répond : « C’est une bénédiction. Quand les gens me disent que je n’ai pas idée de ce qu’ils endurent, je les conduis auprès de ma femme et ils retirent leurs paroles. Une chose est sûre : “Toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu”. (Romains 8.28)

Roman (ancien de Gudauta) aide Astan à retirer pour la première fois de sa vie un poisson de l'étang.

Dieu se sert même de la pêche

Le Centre Chrétien comporte aussi une petite salle de massage pour les personnes handicapées trop tendues. Là, Roman, ancien de l’église, s’efforce de reconstruire les muscles des enfants handicapés à l’aide de quelques appareils de kinésithérapie. Il ne manque pas les occasions d’annoncer l’Évangile.

Les chrétiens sont très reconnaissants pour chaque chaise roulante. Sur un terrain de jeux ont été installées des balançoires sur lesquelles on peut fixer des chaises roulantes, à la grande joie des enfants.

Un étang pour la pêche a aussi été aménagé à proximité, où les jeunes handicapés sont également invités. C’est ainsi qu’Astan a attrapé son premier poisson. Il en a été si heureux que cela a provoqué une nette amélioration de son élocution. Les proches de l’enfant se sont écriés : « Mais quelle sorte de gens êtes-vous donc ? Comment peut-on aider quelqu'un à parler en le faisant pêcher ? » C’est que les chrétiens ont un Dieu vivant !

Les parents apprécient beaucoup que ces chrétiens leur rendent visite, les aident et emmènent leurs enfants handicapés au culte. En effet personne d’autre ne se soucie d’eux en dehors des maigres 20 € d’aide publique mensuelle par enfant.

Christ est le bon berger, aussi pour des handicapés

Un soir on frappa à la porte d’une famille chrétienne, c’étaient deux femmes abkhazes avec deux enfants, dont l’un était Astan. On les a invités cordialement à entrer malgré l’exiguïté du logement. Un ancien a expliqué par la suite : « Quand des gens viennent ainsi d’eux-mêmes, sans invitation, c’est une marque de grande confiance. Il faut les accueillir quelle que soit l’heure. C’est une bonne occasion de leur parler de Dieu. »

Astan (au milieu) a récité le Psaume 23 aux frères de la mission Alexander J. (à gauche) et Michael R. (à droite).

Au cours de la conversation Astan a demandé la parole et a récité par cœur presque tout le Psaume 23. Un garçon en chaise roulante, sans avenir ni espoir, qui parle d’eaux paisibles, de verts pâturages, d’une table bien garnie, à laquelle Jésus l’invite !... Il a ensuite remercié les hôtes de l’avoir écouté. Mais comment avait-il appris ce psaume, lui qui ne va pas à l’école et ne sait pas lire ? Il avait demandé à sa tante, non chrétienne, de lui lire quelque chose dans la Bible pour pouvoir ensuite le réciter à l’église.

Parfois nous ne savons pas comment atteindre les gens avec l’Évangile. En Abkhazie, c’est en lavant des couches pendant cinq ans !... Alors, un jour, une tante (celle d’Astan) vient voir des chrétiens et leur demande : « Mais qu’êtes-vous donc comme personnes ? » Et cette tante connaît le psaume 23 par cœur, parce qu’elle l’a appris avec son neveu. Celui-ci ne saura jamais chanter ou prêcher comme d’autres, mais il a atteint sa tante avec la Parole. En réponse à notre question, il a dit que ses deux plus chers souhaits étaient de participer à la colonie et d’apprendre à lire, pour pouvoir lire la Bible.

Camp avec handicapés adultes

Des colonies de vacances pour handicapés

Plusieurs colonies ont lieu chaque année en Abkhazie. Lors de la dernière, en octobre, il y eut plus de cinquante enfants avec leurs mères. On organise aussi des séjours de vacances pour handicapés adultes.

Lors de la dernière session on a distribué des T-shirts avec l’inscription encourageante “Dieu t’aime”. Cela apporte une note de joie dans cet environnement si triste, marqué par les ruines.

Ces colonies créent des contacts avec les familles qui sont ensuite visitées. Les chrétiens les aident, leur apportent de la nourriture, des vêtements et, parfois… une machine à laver.

Prescriptions publiques qui ouvrent des portes

La ville d’Ochamchira – avec partout des stigmates de la guerre –, fière de ses 2500 ans d’histoire, a aussi une communauté chrétienne qui est encore en phase de création. Celle-ci invite les enfants en difficulté de la région pour une rencontre hebdomadaire. Il en vient entre trente et cinquante. À plusieurs reprises, il est arrivé que des enfants se soient évanouis de faim et il a d’abord fallu les nourrir pour qu’ils soient en mesure d’écouter ce qui est dit.

Le gouvernement autorise les rassemblements dans les églises, mais sous condition : il faut bâtir une petite hutte dans le style national à côté de la salle de réunion, aménager un petit terrain de sport, un terrain de jeux et des toilettes.

Terrain de jeux

Ce n’est pas une petite affaire pour ces églises : les évangélistes doivent faire les travaux eux-mêmes et il faut en trouver le financement. Si ces exigences de l’État ne sont pas respectées, l’autorisation d’organiser des cultes est retirée. Or la communauté chrétienne est souvent le seul endroit où il y a un terrain de jeux, de sorte que les enfants y viennent d’eux-mêmes. Ainsi ces prescriptions ouvrent des portes pour le contact avec les enfants et les adolescents.

Les drogues représentent un danger particulièrement grand pour les jeunes et les adultes. S’il vous plaît, priez pour que Jésus-Christ apporte la délivrance.

Tquartchal, ville fantôme

Lueur d’espoir dans la vallée de la mort

Les plus grandes difficultés se trouvent dans la région montagneuse de Tquartchal. Quelques 40 000 personnes vivaient dans cette localité créée après la 2e Guerre Mondiale pour extraire du charbon. Aujourd'hui, il en reste environ 5000 dans une ville fantôme située dans une vallée circulaire, assiégée et bombardée durant 400 jours, pendant la guerre. On se demande comment les gens survivent dans ces ruines et sans travail.

L’église a reçu gratuitement une maison bombardée avec son terrain, à la condition d’y aménager un terrain de jeux. La maison voisine a pu être réhabilitée en lieu de culte. L’essentiel du travail a été réalisé par des personnes qui s’étaient converties dans un centre de réinsertion et que Dieu a libérées de la drogue.

Des maisons mitraillées, en ruines, deviennent des lieux de culte chrétiens. Des SDF adonnés à la drogue deviennent des rachetés du Seigneur. Beaucoup d’entre eux vont apporter l’Évangile dans des endroits où d’autres craignent d’aller.

Priez pour les autorités

En août 2019, il y a eu les élections présidentielles et chaque église proposait une carte avec rabat portant la mention : « Prière pour le président d’Abkhazie », et demandant de prier que Dieu protège le pays du chaos et donne au président la sagesse nécessaire pour assumer sa fonction.

En effet, un jour un ancien d’une église a été invité par le Président. Celui-ci a alors sorti une Bible d’un tiroir, l’a ouverte et y a lu : “J’exhorte donc, avant toutes choses, à faire des prières, des supplications, des requêtes, des actions de grâces, pour tous les hommes, pour les rois et pour tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté. Cela est bon et agréable devant Dieu notre Sauveur, qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité.” (1 Timothée 2.1-4)

Puis le président a demandé à qui s’adressent ces paroles. « À tous ceux qui croient en Dieu ! » répondit l’ancien. Et le président lui dit : « Allez et faites ce que votre Dieu vous a demandé. Si vous voulez mener une vie tranquille, comme il est écrit là, alors priez pour le gouvernement ! »

Courage ! Dieu vous portera

C’est ainsi que Dieu peut toucher le cœur des dirigeants, afin qu’ils lisent la Parole. Et cela encourage fortement les chrétiens à obéir à la Parole. Bien sûr, eux aussi peuvent connaître des difficultés et la persécution. Mais n’oublions pas que c’est Dieu qui tient le calendrier. C’est lui qui a décidé du moment où Jésus devait naître (Galates 4.4-5), c’est lui qui décide de la durée des difficultés ou de la persécution dans votre vie. Mais faites-lui confiance : il vous portera à travers tout cela. On peut toujours repenser avec émerveillement à ces réalités : nous ne sommes pas perdus, parce que Dieu nous a portés. Il bâtit son Église et il ne change pas.

C’est Lui qui ouvre les portes et, tant que nous pouvons travailler, tant qu’il fait jour, agissons et apportons l’espoir et la Bonne Nouvelle de l’Évangile, car la nuit vient où plus personne ne pourra travailler.

 

Chers amis de la mission, veuillez prier pour le travail et les projets en Abkhazie et demandez un renouveau spirituel pour ce pays.