Dieu n’abandonne ni les veuves ni les orphelins
Le service de la famille Tarnopolsky
Depuis de longues années la mission FriedensBote/Messager de la paix soutient l’orphelinat familial de Nadia (Nadia, diminutif de Nadejda, Nadège en français, qui signifie Espoir, Espérance) et Vadim Tarnopolsky. (cf. nos articles Vœu du père des orphelins, Vadim…, ses obsèques, N°4/2016 et Maman, tu ne m'amèneras pas chez les singes ? N°80, en 2003)
Vadim a toujours eu un grand cœur pour les orphelins, car il avait lui-même passé son adolescence dans un home d’enfants. En 2002, on a détecté chez lui une tumeur au cerveau, qui a été alors opéré. Il a pu assurer ses services jusqu'en 2015. Puis, les médecins ont découvert plusieurs tumeurs réparties dans tout le corps. Peu avant que Vadim Tarnopolsky ne retrouve son Sauveur dans l’éternité, le 10 décembre 2015, il exprima un dernier souhait : « Si Dieu l’a prévu ainsi, je suis prêt à partir. Mais je me fais du souci pour mon épouse Nadia et pour les orphelins que nous avons accueillis. S’il vous plaît, ne les abandonnez pas ! »
Cinq ans se sont écoulés depuis lors et de nombreux amis de la mission ont prié pour Nadia, la veuve, et pour les orphelins et les ont soutenus. En revenant sur toutes ces années, nous pouvons déclarer : « Dieu n’abandonne pas les veuves ni les orphelins ! »
Dernièrement Viktor Martchouk, le pasteur de l’église d’Ouzyn, en Ukraine, s’est entretenu avec Nadia et nous en donne le compte-rendu suivant :
Qu’est-ce qui peut changer chez une veuve et des orphelins ?
Il y a quelques semaines, la famille de Nadia a connu de grands changements dont nous aimerions vous informer. De nouveaux orphelins ont été accueillis dans la famille. Nous nous sommes enquis des mobiles qui ont conduit à cette décision.
Viktor : Nadia, les changements intervenus dans votre famille ont surpris bien des gens, ceux qui te connaissaient déjà personnellement et ceux qui avaient seulement entendu parler de toi. Peux-tu nous en dire un peu plus sur ces nouveaux enfants ?
Nadia : Depuis 2002, Vadim et moi avions accueilli douze enfants orphelins par groupes de six, en plus des deux nôtres. Entre-temps, les enfants du premier groupe sont devenus adultes. D’abord, désormais veuve, il me semblait impossible d’accueillir d’autres enfants : cela représente beaucoup de travail et je n’y arriverais pas sans mon mari.
Mais c’est alors que j’ai entendu parler de mes nouveaux protégés. Ce sont six frères et sœurs qu’on faisait passer d’un orphelinat à l’autre. Personne ne voudrait adopter tous les six à la fois ! Pour les décrire, je dirais que ce sont des Mowglis, autrement dit : ils sont à l’abandon. Ils sont certes avides de connaissances, mais chacun s’exprime avec difficulté.
Dieu prépare les cœurs
Le Seigneur Jésus avait "planté" ces enfants dans mon cœur. Je voulus savoir où ils sont et comment ils se portaient. Pour finir, je les ai pris avec moi. Alexandre et Sergueï sont des jumeaux de cinq ans et demi, des garçons qui ne parlent pratiquement pas. Ils commencent à sourire et aussi à s’exprimer peu à peu. Tonia et Olga, également jumelles ont sept ans et demi. Il y a encore Elena, douze ans et Nicolaï, treize ans. J’espère que nous y arriverons et que ces enfants souriront comme nous tous. L’essentiel pour moi, c’est qu’ils n’entendent pas simplement l’Évangile de leurs oreilles, mais qu’ils le reçoivent aussi dans leur cœur et deviennent des enfants de Dieu.
Cela fait plusieurs semaines qu’ils sont chez nous et je suis heureuse qu’ils soient contents qu’on prie ensemble avant les repas. Il est vrai que pour l’instant ils ne sont pas en mesure de comprendre le sens des récits bibliques, mais j’ai confiance en ce que les choses se mettent peu à peu en place.
N’avoir jamais été embrassé par une mère
Hier, j’ai pris l’aînée des filles dans mes bras. Kolia, le garçon de treize ans, m’a regardée avec de grands yeux. Je me suis écriée : « Viens ici, mon chéri, toi aussi, je te prends dans mes bras ! » Il fallait voir son émotion en se serrant contre moi, jamais encore une mère ne l’avait pris dans ses bras et cajolé. Un tableau difficile à décrire !
En fait ces enfants ont des tantes, mais elles ne manifestent aucun intérêt pour eux. Ils ont aussi une sœur de 18 ans et deux frères plus grands dont je ne connais pas l’âge.
Leur père était parti en Pologne comme travailleur migrant et il y serait mort dans un accident de la route. La mère vit avec un autre homme et ne s’intéresse absolument pas à ses enfants. C’est ce qui les a amenés à l’orphelinat.
Voilà les nouvelles les plus importantes du moment. Ce qui me tient le plus à cœur, c’est que ces enfants entendent parler de Dieu et de son amour pour ses créatures.
Un choix difficile
Viktor : Nadia, je crois que pour cette décision, il t’a fallu bien des jours pour la prendre, n’est-ce pas ?
Nadia : Ça, c’est vrai !
Viktor : Comment en es-tu arrivée à cette résolution ? Même un couple n’aurait pas pu facilement d’assumer une pareille charge.
Nadia : Le plus dur a été de me décider franchement. Autrefois c’était plus facile : Vadim et moi, nous avons prié ensemble, puis nous avons décidé d’agir. Maintenant les choses ne sont plus du tout pareilles. Le Seigneur Jésus m’a amenée étape après étape à faire ce pas. J’avais d’abord pensé n’en accueillir qu’un seul, tout au plus deux. Mais Dieu m’a montré une toute autre voie. J’avais arrêté ma pensée sur deux enfants, mais à cette idée mon cœur restait froid, ce n’était tout simplement pas ma voie. Puis j’ai dit à mes enfants : « C’est peut-être terminé ; nos enfants sont devenus grands et ça suffit comme ça. » Mais j’ai continué à cogiter… j’ai entendu parler d’orphelins… parfois je les ai vus… je pensais à eux...
La place des enfants est dans une famille !
Cette pensée ne me lâchait plus : « Je suis tout de même capable d’apporter une certaine aide à ces enfants. Bien sûr que je sais qu’il ne dépend pas de moi que ces enfants viennent à Dieu ou non. Ma responsabilité, c’est que ces enfants entendent parler de Lui.
Il y eut un temps où je me sentais coupable de ce que certains enfants n’aient pas donné leur cœur à Dieu. Mais Dieu m’a envoyé des frères dans la foi qui m’ont clairement expliqué ce qu’est ma mission : prier pour les enfants et leur tracer la voie vers Dieu.
Tandis que je réfléchissais, prenant conscience que l’éducation des protégés de ce moment-là me donnait assez de travail, il y eut toujours de nouvelles situations où je voyais des enfants dans d’autres familles. Cela m’a clairement montré qu’il était indispensable que les enfants vivent dans des familles. Il fallait que je me décide et je l’ai fait. Les larmes aux yeux et le cœur vraiment serré.
J’ai d’ailleurs une dette de reconnaissance envers mes enfants. Quand je leur ai dit que nous allions accueillir d’autres enfants, ils ont dit : « Très bien ! S’il s’agit d’en accueillir d’autres, eh bien, nous allons les accueillir ! »
« Et nous, étions-nous comme eux ? »
Viktor : Comment s’est passée la période d’intégration des nouveaux enfants dans votre famille ? Et vos protégés qui vivent déjà chez vous, comment s’habituent-ils aux nouveaux ?
Nadia : J’ai l’impression que la période d’adaptation est encore loin d’être terminée. Les enfants se voient servir des aliments qu’ils n’avaient jamais vus. Même les pommes de terre sont préparées autrement chez nous qu’à l’orphelinat et, actuellement par exemple, nous leur apprenons à manger des oignons et des choses de ce genre. Cela amuse nos "anciens" et ils sourient en voyant les nouveaux enfants manger des choses encore inconnues.
Notre fille adoptive, qui est déjà mère de famille, regarde souvent avec de grands yeux les nouveaux à table et ne cesse de me demander : « Maman, étions-nous comme eux, quand nous sommes venus chez toi ? » Et quand je confirme qu’eux aussi réagissaient ainsi, elle reste sans voix et quitte la pièce. Elle et ses trois frères et sœurs ne veulent pas croire qu’eux aussi se comportaient ainsi.
L’amour fait fondre les cœurs
Les "nouveaux" ont un peu plus de mal à cause de leur difficulté à s’exprimer. Pour cette raison, à l’orphelinat, ils ont parfois dû "encaisser" certaines choses et cela les a inhibés. Maintenant ils deviennent plus gais et commencent à parler. Sergueï est un peu lent, parce qu’il a subi beaucoup d’avanies. Maintenant lui aussi commence à sourire. Quand je les appelle, tous accourent en discutant. Ce sont les premiers signes qu’ils ont le sentiment d’avoir peu à peu trouvé un chez soi.
Il n’est pas facile de comprendre ce qui se passe dans leur cœur. Ainsi, un jour, j’ai pris les filles avec moi au marché pour leur acheter des pantoufles. Elles se sont accrochées à moi, évitant le moindre écart. J’ai expliqué à une vendeuse que nous avions besoin de pantoufles. Elle nous a donné à essayer quelques paires. Les filles ne savaient absolument pas que faire et pour chaque paire elles disaient : « C’est bien, elles sont bonnes. » J’aurais aussi bien pu les acheter toute seule, mais il faut bien que ces filles apprennent à se prendre en charge.
Enfin l’animation est revenue dans la maison
L’acclimatation des enfants ne donne plus de surprise. Tous réagissent normalement : « Super ! Nous sommes de nouveau nombreux ! Il y a de nouveau de l’animation dans la maison ! On casse de nouveau de la vaisselle ! » Et ainsi de suite.
Pourtant la vie en famille reste une nouveauté pour ces enfants. Il leur faudra encore du temps pour s’habituer à ce nouveau mode de vie. Seulement un exemple : plus besoin de craindre de ne pas trouver de pain, le matin. Mais, il leur arrive encore d’en prendre un morceau en douce pour le cacher sous l’oreiller…
« Ils feront toujours partie de notre famille »
Viktor : Avez-vous assez de lits ?
Nadia éclate de rire : Oui, ils suffisent. Les plus grands garçons ont déménagé dans la pièce principale. Dennis est déjà autonome ; il a un travail et vit séparément de nous. Il est devenu un vrai adulte, un jeune homme sérieux. Dieu soit loué !
Viktor : Nadia, parle-nous un peu des enfants plus grands qui sont depuis longtemps chez vous, mais font toujours partie de la famille.
Nadia : Ils continuent naturellement toujours à faire partie de notre famille. De ceux que nous avions accueillis en dernier, avant le décès de Vadim, il reste trois chez nous. Yevguéni a déjà 18 ans ; il termine une école supérieure et va bientôt travailler. Alica a huit ans et Xénia treize. Il y a encore notre propre fils ; il n’est pas encore marié et vit chez nous. Il est mon principal soutien et mon aide.
Priez pour le salut des personnes
Nadia : Je vous prie avant tout d’intercéder pour moi. J’ai besoin que Dieu m’accorde sa sagesse, pour savoir comment faire avec les nouveaux enfants. Je me vois confrontée à quantité de problèmes nouveaux. Nous avons déjà eu les enfants les plus divers, mais ceux-ci sont encore tout à fait différents. Et il est important qu’ils comprennent ce que Jésus a fait pour eux. Je ne cesse de leur expliquer que ce n’est pas moi qui les ai choisis parmi les milliers d’enfants dans les orphelinats, pour les faire venir dans notre famille : ce choix, c’est Dieu qui l’a fait. Voilà mon premier souci.
Et c’est naturellement mon souhait que les enfants qui se sont une fois approchés de Dieu, établissent une véritable relation avec lui. Mais, je le sais bien, ça c’est entre les mains de Dieu et dépend de sa bonté.
À 11 dans une voiture à 5 places
Encore quelques mots sur des affaires d’ordre matériel et plus exactement notre mode de transport. Nous avons une vieille Renault Kangoo de 5 places. Il est, bien évidemment, interdit de rouler à 11 dans une voiture à 5 places. Ainsi, nous n’avons pas la possibilité de nous rendre quelque part par nos propres moyens. Nous sommes reconnaissants que Viktor Martchouk se soit fait notre taximan gratuit, depuis que nous gérons notre orphelinat familial. Mais il ne peut pas toujours être à notre disposition. Jusque-là Dieu a résolu tous nos problèmes, alors que cela s’est souvent fait contre toute attente logique. Nous espérons que pour cette question aussi Dieu va trouver une solution. Je crois que tout problème a sa solution. Mais quand et comment le Seigneur Jésus va nous aider, nous l’ignorons.
Voilà les nouvelles de la famille Tarnopolsky. Nous remercions Dieu d’avoir donné à Nadia un cœur aussi miséricordieux et dévoué. Prions pour cette famille et continuons à la soutenir. Dans le passé le service de cette famille a glorifié Dieu. Les enfants arrivés dans cette famille ont reçu et reçoivent non seulement le pain quotidien, mais aussi la possibilité de découvrir le Seigneur Jésus-Christ.
"Car nous sommes son ouvrage, ayant été créés en Jésus-Christ pour de bonnes œuvres, que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions." (Éph 2.10)
Viktor Martchouk