donnez-leur vous-mêmes à manger

Continueras-tu à nous rendre visite ?

En quête de sécurité

Le regard de Julia s’attache avec insistance au visage du visiteur ; elle est visiblement très tendue. « Bien sûr que je reviendrai, et même bientôt... dès le mois prochain !» Un grand soulagement détend le visage de Julia, à la dérobée un léger sourire passe sur son regard. Le visiteur venu d’Occident ne lui sauve certes pas la vie, mais à cet instant son monde se serait certainement écroulé si la réponse avait été négative.
Julia est la petite-fille de Poliktin Janovsky, qui est brusquement décédé d’hypertension artérielle le 2 juillet 2013, à l’âge de 53 ans.  Pour tous ceux qui l’ont connu il était un homme unique en son genre, qu’on n’oublie pas facilement. Julia devait se douter qu’il y avait un lien entre la visite de l’hôte étranger et la présence du grand-père. Et la question s’imposait à elle de savoir si désormais toute la famille allait sombrer dans l’oubli. Mais il n’en sera rien.

Les désespérés

Une idée s’impose irrésistiblement : si la perte du grand-père précipite une jeune personne dans un si grand besoin de secours et de protection, alors qu’elle a encore ses parents, sa grand-mère et toute une armée de frères et sœurs pour l’entourer, que peuvent ressentir ceux qui à douze ans se retrouvent à la rue, ne connaissant ni père, ni mère, n’ayant ni frère, ni sœur qui serait en mesure, en cas de besoin de s’interposer pour les protéger ou au moins de leur procurer un bout de pain sec ?
Quand ils sont en groupe, ils prennent une posture d’indépendance, de force, d’inaccessibilité et d’arrogance. C’est leur seule chance de survie. Mais quand vous les approchez entre quatre yeux, à condition qu’ils vous fassent confiance, alors vous vous trouvez en face de jeunes êtres sans défense, infiniment désespérés, qui ne se connaissent aucun avenir et ont appris à ne se projeter que jusqu’au prochain morceau de pain. C’est « no future », pas d’avenir, au sens le plus strict des termes...

Un espoir pour quelques uns

Certains chrétiens se sont donnés pour devise de briser cette malédiction. Et parmi les premiers à s’engager pour les orphelins et les enfants des rues, il y eut Poliktin et sa femme Valentina, de la ville de Khmelnitskiy, en Ukraine. Ils avaient déjà trois filles, puis naquirent plusieurs enfants qui moururent dès la naissance, alors que Poliktin et Valentina rêvaient d’une grande famille. Servir Dieu d’un même cœur comme famille nombreuse, voilà qui devait être merveilleux. Telle était leur conviction.
Après le décès de leurs trois bébés Poliktin et Valentina eurent le profond désir d’accueillir des orphelins dans leur famille. Mais il ne fallait pas y songer du temps du régime athée : en tant que chrétiens ils auraient donné une éducation chrétienne aux orphelins, une perspective insupportable pour les dirigeants d’alors. Puis vint le grand changement des années 1990 qui inaugura une période de liberté de conscience.
« À l’orphelinat il y a un petit garçon qui ne cesse de pleurer et de réclamer sa maman ! » Ce message a été diffusé plusieurs fois à la radio, dans l’espoir, sans doute, que la maman se manifeste. Mais elle ne se fit pas connaître. Poliktin, en revanche, se manifesta. Il vint voir le petit Serguey, âgé d’un an, et il lui plut. Puis il alla chercher sa femme. Lorsque Valentina le prit dans ses bras, il la serra si fort qu’elle ne put se dégager de son étreinte que quand il se fut endormi. C’est ce qui emporta la décision : les Janovsky emmenèrent le petit garçon chez eux. Mais ils durent commencer par l’habiller, car on le leur donna tout nu, l’orphelinat manquant de vêtements.
Les papiers de Serguey indiquaient qu’il était le troisième enfant de sa mère biologique. Poliktin se lança donc à la recherche des autres. Il trouva la petite Natacha, qui avait trois ans de plus, dans un orphelinat pour enfants un peu plus grands et elle aussi fut remise à ses nouveaux parents entièrement dévêtue. Il finit aussi par trouver Aliona qui avait déjà six ans et avait été placée dans un internat à quelques 80 km de là. Lorsque Poliktin la ramena chez lui, elle au moins avait pu garder ses vêtements et il y eut des retrouvailles bouleversantes entre les trois enfants qui n’espéraient plus se revoir un jour.
Aliona raconta alors son histoire. Sa mère n’avait pas de mari et elle buvait. Dès que les enfants surent marcher, ils durent aller mendier parce qu’il n’y avait rien à manger. Les voisins et les vendeurs du magasin leur donnaient toujours un petit quelque chose pour qu’ils ne meurent pas de faim. Et un beau matin la mère avait disparu après avoir fermé la porte à clé.
Quand le bois de chauffage fut épuisé et que tout fut gelé dans la maison, Aliona envoya ses petits frère et sœur au lit, si on peut appeler cela ainsi, et leur commanda d’y rester. Elle ne se souvenait plus du moment où elle-même s’était écroulée, sans connaissance. Les voisins furent finalement intrigués qu’il n’y avait plus de signe de vie dans la cabane et découvrirent les trois enfants dans leur misérable situation.
On les plaça alors dans plusieurs centres, en fonction de leur âge, et ils ne se seraient jamais retrouvés, si Poliktin et Valentina ne les avaient pas réunis sous leur toit.
Peu après les Janovsky ont encore accueilli trois autres enfants et fondé ainsi le premier centre familial dans la région de Khmelnitski.

Un bâtiment pour le travail parmi les orphelins

Tous deux comprirent bien vite qu’ils ne pourraient pas accueillir chez eux tous les orphelins, ni les enfants des rues dont le nombre augmentait vite en ville. Dans l’arrière-cour d’un grand bâtiment il y avait une petite annexe délabrée où venaient souvent se réfugier des SDF. La municipalité mit cette bâtisse gratuitement à la disposition de Poliktin pour son travail. Aidé de ses quatre garçons, il se mit au travail.

Il s’agissait avant tout de relever le plancher, vu qu’il fallait descendre plusieurs marches pour entrer. On y pelleta le chargement de plusieurs camions de sable sur lequel on posa le nouveau plancher. On releva également les fenêtres et les portes. C’est dans ces locaux que Poliktin put « accueillir » les enfants des rues. À table il y avait parfois 65 enfants des rues affamés.
 La chose vint aux oreilles des gens et beaucoup apportèrent de la nourriture, mais on était dans les années 1990, alors que tout le monde avait faim. Un jour quelqu’un apporta un seau de miel et ce jour-là on servit des crêpes au miel, Poliktin ayant pu « se procurer » la farine nécessaire : au moment voulu l’aide nécessaire arriva, on ne sait d’où...

Entre-temps notre mission avait envoyé des semi-remorques de produits de première nécessité. En l’espace d’un an, en collaboration avec nos frères et sœurs canadiens, nous avons acheminé 11 semi-remorques de vêtements chez Poliktin. Et tout cela, ils l’ont redistribué ; la famille toute entière, du plus grand au plus petit, y a apporté son aide. À cause du décompte réclamé par l’État il fallait noter le nom, l’adresse et le numéro de passeport de chaque destinataire, ainsi que la quantité approximative de produits emportés par chacun. Poliktin put présenter aux contrôleurs de gros livres avec d’innombrables adresses.

Le travail devient trop grand

La nouvelle de la distribution de produits s’est propagée bien au-delà des limites de la ville. Des gens venaient même par le train ; un jour une femme est venue de Crimée chercher des vêtements. Le matin on pouvait compter jusqu’à 300 personnes rassemblées devant le bâtiment de la mission. Et bien que chacun n’eût que 10 minutes pour faire son choix, cela continuait jusque tard le soir, avant que le dernier ait été satisfait. En un an toute la famille en était arrivée à la limite de ses forces. Il ne leur restait que le dimanche pour la vie de famille et pour aller au culte. Mais même le dimanche matin Valentina courait vite à la maison de la mission qui n’était qu’à 100 mètres de l’endroit où ils habitaient alors. Le plus souvent elle y trouvait des gens venus de quelque village ou d’une autre ville et qui avaient dépensé leur dernier argent pour cela. Ceux-là étaient alors servis, même le dimanche.
Mais certains revenaient à une fréquence étonnante. Poliktin demanda à ses enfants de les suivre. Ceux-ci constatèrent que ces gens portaient les affaires au marché pour les y vendre. Il fallait faire quelque chose contre cette dérive. À partir d’un jour fixé Poliktin demanda à ceux qui venait chercher des produits de présenter un certificat officiel attestant leur situation de nécessiteux. Le nombre des jours de distribution fut ramené à deux par semaine et la quantité des livraisons diminuée. Ainsi il restait au moins un peu de temps pour s’occuper des enfants de la rue.
Le plus souvent les enfants des rues ne restaient pas longtemps au même endroit, mais migraient ailleurs. Il y eut pourtant un groupe d’enfants qui resta à proximité de Poliktin. Ils recevaient chaque jour un repas, naturellement très simple, mais c’était en tout cas un repas chaud et ce détail était important. Si les enfants n’avaient pas d’endroit où dormir, ils pouvaient rester dans le bâtiment de la mission. Mais Poliktin insistait pour qu’on n’y apporte ni colle à inhaler, ni alcool, ni cigarettes. Il organisait régulièrement des séances bibliques pour eux et bientôt ils surent par cœur toute une série de cantiques et de versets bibliques.

Un exemple du travail de Poliktin : Yvan Wenger

D’une manière ou d’une autre Poliktin tâchait de tirer les enfants de la rue. Pour les aînés il trouvait des places de formation professionnelle.

À ce titre Yvan Wenger serait un bon exemple. Sa mère, une certaine Emma Schröder, avait quitté sa famille, son père est mort à un moment donné et ainsi Yvan, tout comme sa sœur et son frère se retrouvèrent dans un internat dont ils s’enfuirent à cause de la terreur qui y régnait, d’après le récit qu’il en fit par la suite.
Il faut dire que la fille ne supporta pas la vie dans la rue et les mauvais traitements et se suicida six mois plus tard. Yvan entra en contact avec Poliktin qui lui procura des papiers attestant des études de collège et lui trouva une place dans une école d’agriculture. Naturellement après avoir vécu dans la rue il eut à l’école des difficultés avec les maths et la chimie. Mais dès la fin de la première année de formation les professeurs affirmèrent avoir rarement eu dans leur établissement un mécanicien aussi doué et travailleur.
On lui permit de faire ses preuves sur un tracteur devenu irréparable, qui n’avait plus que la valeur de la ferraille. Yvan réussit à le faire redémarrer, s’en servit pour labourer le potager des gens du village, il gagna ainsi un peu d’argent et put s’acheter une veste de cuir, le rêve de sa vie. Par la suite il fut embauché par une entreprise d’essai de matériel, où il travaille maintenant avec un tracteur dernier cri, un John Deere. Depuis lors il s’est marié et a des enfants. Il vient parfois rendre visite aux Janovsky.
Il y a bien d’autres exemples de ce type. Tous les enfants de la rue ne sont pas devenus croyants, mais ils ont chacun suivi un cours biblique de base et nous savons que la Parole de Dieu ne revient pas à vide, mais produit l’effet pour lequel elle a été répandue.

Un nouveau bâtiment

Le bâtiment mis à la disposition de Poliktin se situait dans l’arrière cour d’un immeuble, un endroit inaccessible aux gros camions et donc peu pratique. De plus il appartenait à la municipalité. En accord avec notre mission Poliktin chercha un terrain adéquat et le trouva dans la rue de la Victoire, non loin du commissariat de police. Il avait 1800 m2 et put être acquis pour 3000 €. Il comportait une porcherie qui fut démolie et dont les briques servirent à élever le niveau inférieur du bâtiment de la mission « Main secourable ».  Des enfants des rues ont aidé à la construction et naturellement aussi les enfants de la famille. Dès l’achèvement du rez-de-chaussée Poliktin y accueillit des garçons de la rue. Au moins y dormaient-ils dans des véritables lits avec matelas et draps. Et ils étaient surveillés.

La police et le parquet ne manquèrent évidemment pas de faire une visite, à la recherche de jeunes qui avaient commis des délits. On n’a bien sûr jamais suspecté Poliktin d’avoir participé aux mauvais coups des jeunes, mais ceux-ci se sont rendus coupables bien des fois. Peu à peu certains se rangèrent ; ils sont à présent adultes, plusieurs ont fondé une famille et mènent une vie réglée. D’autres ont fui et ont été perdus de vue.

Changement de politique familiale

En Ukraine la vie dans la rue a changé ces dernières années. La police met la main sur les enfants des rues et les place en internat. S’ils s’enfuient, on les y ramène. De plus le gouvernement s’est fixé pour objectif de placer les enfants dans des familles et de fermer les internats et les orphelinats ! Quant à savoir qui accueillera les plus de 100 000 enfants, nul ne le sait. Mais le plus souvent ce sont des chrétiens confessant qui recueillent les enfants. À cet égard Poliktin a joué un rôle déterminant. Lors de congrès chrétiens organisés dans diverses régions d’Ukraine il n’a cessé de parler du sort des enfants et de ses expériences. Il a aussi conseillé des parents prêts à accueillir des enfants.
Lorsque les enfants pris en charge par Poliktin et Valentina sont devenus adultes, ils ont l’un après l’autre quitté la famille d’accueil. La première à se marier fut Aliona qui a aujourd'hui trois enfants à elle. Puis Victor a entrepris une formation de menuisier dans une autre ville ; actuellement il étudie l’architecture ! Natacha a deux enfants et Serguey un fils. Vassiliy et Igor ont leur propre logement en ville et ils ont un emploi.

Une fois les enfants devenus indépendants, les autorités ont demandé aux Janovsky d’accueillir un nouveau groupe d’enfants et c’est ainsi que six nouveaux enfants sont venus dans la famille.
Poliktin a expliqué que l’une des tâches les plus terribles de sa vie a été de choisir les enfants qu’il allait accueillir dans sa famille. Des centaines d’yeux le suppliaient : « Prends-moi donc plutôt ! » Et il ne pouvait pas les emmener tous...
Après avoir pris la décision de prendre Yaroslav (surnommé Yarik) et Jana, sa sœur aînée, il eut un entretien personnel avec chacun d’eux, pour mieux les connaître. Ce faisant il aperçut à plusieurs reprises un garçon, à la peau sombre, qui se tenait derrière le coin et écoutait attentivement. À un moment donné celui-ci sortit de sa cachette et demanda quel avait été le sujet de ces entretiens. Quand il découvrit qu’il s’agissait d’entretiens préparatoires à un accueil dans la famille, il mendia d’une manière déchirante le droit d’être emmené lui aussi une fois, au moins pour un week-end : « Je n’ai jamais été à la maison ! » « Comment pourrais-je t’emmener ? » lui demanda Poliktin « tu fumes et chez nous on ne fume pas ! » - « Je vais tout de suite arrêter de fumer ! » déclara le garçon. Il était trop tard  pour l’emmener en vue de la prochaine fin de semaine, mais Poliktin lui promit de l’emmener le week-end suivant, sous condition de l’autorisation du directeur de l’orphelinat.
Le vendredi suivant le garçon attendait déjà au portail. « De toute la semaine je n’ai pas fumé ! » s’écria-t-il aussitôt. C’est ainsi qu’Amiran, tel est son nom, vint à l’essai dans la famille. Il s’efforça de tout imiter : pour la prière il se mit debout ou à genoux, il essaya de redire après d’autres les paroles du « Notre Père » et manifestait une peur panique d’être ramené à l’orphelinat.
Son sort est vraiment tragique. Un matin une femme pauvre est allée à la benne à ordures et a découvert à côté un sac plastique qui bougeait. Regardant dedans, elle eut un choc : il contenait un garçon nouveau-né. Après un séjour à l’hôpital, on mit le garçon dans un orphelinat. Nul ne sait qui sont ses parents. Comme il était assez sombre de peau, on l’appela Amiran, ce qui a une tonalité caucasienne.
Amiran dut fréquenter une classe spéciale à programme allégé, parce qu’il n’arrivait pas à suivre le programme scolaire normal. Mais on n’imaginerait plus la famille sans lui : il est devenu le soutien des parents, on a toujours pu lui faire confiance. Il a achevé ses cours spéciaux avec de très bons résultats et il suit actuellement une formation en menuiserie.
Outre Amiran, Jana et Yarik, la famille se compose encore d’Andréï, Serguey et d’Artem, le cadet. Tous les six ont été accueillis au cours de l’année 2006.

Le tragique 2 juillet 2013

Il était prévu de fêter les 13 ans d’Artem dans la maison des colonies de vacances. Celle-ci se trouve à 17 km de Khmelnitsky et put être acquise à la fin des années 1990 pour 5000 €. Il y avait justement une colonie pour enfants. Poliktin était rentré passer la nuit, arroser les fleurs et mettre un peu d’ordre. Il voulait aussi acheter un gâteau d’anniversaire. Mais ce 2 juillet il ne ressortit pas de sa chambre. Amiran qui l’avait accompagné, veilla à ne faire aucun bruit, pour ne pas déranger son père dans son repos. Mais à midi arriva un frère qui s’inquiétait de savoir pourquoi Poliktin n’était pas venu à la rencontre de prière des frères responsables de l’Église. On trouva Poliktin étendu sans vie par terre : il s’était préparé pour la rencontre de prière, mais a dû mourir d’une crise cardiaque ou d’une attaque. Les mois précédents sa tension était montée parfois au-delà de 26.
Les obsèques eurent lieu le vendredi 5 juillet. Le soleil était chaud alors qu’à 10 heures le cercueil fut dressé dans la cour sous un rosier pour la cérémonie des adieux. La cour se remplit d’amis et de frères et sœurs en la foi ; on y compta aussi des représentants des autorités locales.
Dans sa vie de la ville de Khelnitsky, Poliktin a joué un rôle plus important qu’on ne l’imagine. C’est particulièrement vrai pour les années 1990, alors que tout semblait aller à la catastrophe dans le pays. Dans chacune des 30 écoles et plus de la ville il avait aidé des élèves pauvres avec des vêtements et des chaussures. Dans les entreprises beaucoup  d’ouvriers le connaissaient, parce que là aussi il avait apporté de l’aide. Dans toute la région les Janovsky étaient les premiers à avoir créé un centre familial pour orphelins.
Des pasteurs d’une vingtaine de communautés de la région se sont retrouvés pendant  des années chez lui pour des rencontres de travail. Certaines de ces communautés sont nées suite au travail de Poliktin.

La vie continue

C’est Poliktin qui avait fondé la mission « Main secourable ». Vassily Guminiouk, son gendre,  a repris alors sa direction. Dans un entretien Vassily a déclaré qu’il lui semblait évident que la mission, et tout ce que Poliktin avait mis en route, devait continuer à fonctionner. Lui et sa femme, Tatiana, la fille de Poliktin, considèrent les enfants accueillis comme leurs propres frères et sœurs dont ils ne veulent en aucun cas se séparer. Valentina, l’épouse de Poliktin, a expliqué qu’après le décès de son mari pas une seule instance administrative ne lui a fait de difficultés pour régler les diverses formalités. Dès qu’un fonctionnaire apprenait qu’il s’agissait de la famille Janovsky, ils présentaient leurs condoléances et faisaient immédiatement le nécessaire, sans délai.

Désormais la sœur Valentina doit élever les enfants accueillis sans son mari. Mais elle n’est pas toute seule : sa seconde fille l’a toujours soutenue ; elle est elle-même mère de trois enfants et son mari, Vassiliy Guminiouk a repris le poste de Poliktin dans la mission « Main secourable »

Dans ces derniers temps, Poliktin a été membre de la commission qui devait statuer sur la séparation des enfants de leurs parents. Il a expliqué combien il a souffert un jour en voyant qu’on enlevait ses enfants à une femme étendue ivre par terre. Un policier prit un petit garçon dans ses bras et le porta à la voiture, tandis qu’une fillette, de huit ans peut-être, secouait la jambe de sa mère en criant : « Maman, réveille-toi donc ! Ils ont déjà emmené Vassia et maintenant c’est notre tour ! » Mais la mère ne se réveilla pas...
Lorsqu’une autre famille délabré fut menacée de se faire retirer les enfants, Poliktin, accompagné de quelques frères et sœurs chrétiens, se rendit dans le village en question et aida la famille à mettre un peu d’ordre dans la maison. Un frère installa le courant, pour que la famille ait l’électricité, d’autres firent de leur mieux pour réparer au moins un peu la maison. Lorsqu’arriva ensuite la commission qui devait décider du retrait des droits parentaux, elle constata les améliorations positives et ajourna la décision. Depuis lors la famille est venue au culte. Et si les parents font des efforts, les enfants pourraient rester chez leurs parents. Veuille le Seigneur faire grâce à cette famille.
Les chrétiens de Khmelnitsky, eux aussi, veulent poursuivre ce travail, pour que les familles soient préservées et que les enfants ne soient pas envoyés dans des orphelinats.