donnez-leur vous-mêmes à manger

La lumière de l'Évangile arrive au-delà du cercle polaire

Quatre messagers (ci dessus à Verkhoïansk), soutenus par la Friedensbote, ont quitté Yakoutsk le 13 mars 2013, pour un sixième voyage missionnaire vers l’océan Arctique. À bord du “Chasseur”, un véhicule tout-terrain, chargé de provisions, d’habits chauds, ainsi que d’une quantité de petites choses nécessaires pour le voyage ; ils ont parcouru 6300 km. Les 400 litres de diesel, en deux fûts, devaient leur permettre de franchir les grandes distances entre deux stations de carburant. La moindre erreur pouvait avoir des conséquences fatales. Le chargement le plus précieux était constitué de Nouveaux Testaments, des journaux chrétiens, notamment “Le chemin du salut” (le tout imprimé grâce aux dons des amis de la Friedensbote), ainsi que de diverses autres littératures.

Les missionnaires et leurs familles

Saïd Protopopov, notre contact en Yakoutie, est la personne clé, ayant participé aux cinq voyages précédents ; des parcours aux extrêmes par la distance, le froid, les dangers, mais aussi par les bénédictions ! Malgré son handicap physique à la suite d’une l’opération d’une tumeur cérébrale, Saïd était très courageux et actif. Il a laissé derrière lui sa femme Natacha, ainsi que sa fille Ruth âgée de deux ans.

Michaïl Troubtchik nous est déjà bien connu. Il y a quatre ans, il avait déménagé avec sa famille nombreuse (six enfants de 3 à 12 ans) en Sibérie orientale, où il poursuit un ministère d’implantation d’églises, après avoir servi de nombreuses années en Yakoutie. Les frères yakoutes l’ont prié de les accompagner.

Micha Sarovnyayev (40 ans) est yakoute. Célibataire, il n’est converti que depuis quatre ans, mais son cœur est brûlant pour Dieu, et les frères ont confiance que sa foi s’affermira par ce voyage et qu’il sera en bénédiction à d’autres.

La participation de Nicolaï Alexeï n’était pas certaine jusqu’au dernier moment, sa femme Anna souffrant d’une enflure dont le diagnostic n’était pas encore établi. Mais elle a dit : « Même s’il s’agissait d’une tumeur maligne, Nicolaï sera certainement de retour au bout de trois ou quatre semaines. Nous aurons alors encore du temps l’un pour l’autre. »

Les dangers des “chemins de la mort”

Voyager sur des fleuves gelés constitue toujours un réel danger. Chaque hiver, des voyageurs périssent gelés, à la suite d’une panne ou noyés parce qu’une couche de glace insuffisante a cédé sous le poids du véhicule. Ceux que nous rencontrons sur la “route” sont toujours surpris de nous voir rouler en “solitaire” : « Nous ne roulons jamais en “solo”, bien que nos véhicules soient plus robustes que le vôtre. Comment pouvez-vous vous aventurer seuls sur un tel parcours ?! » Mais, nos missionnaires ont remis leurs vies entre les mains de Dieu, sachant qu’auprès de Lui est la meilleure des assurances-vie.

À plusieurs reprises, Dieu nous a permis d’annoncer l’Évangile dans ces endroits dangereux. Par exemple, lorsque la glace céda sous une voiture de secours qui s’enfonça et disparut presque sous l’eau. Nous avons découpé un passage dans la glace à l’aide d’une tronçonneuse, avant d’engager à grand peine notre véhicule dans l’eau pour tracter les malheureux. En nous quittant, le chauffeur nous a promis : « Dorénavant, je vais lire les évangiles ! »

À d’autres voyageurs, nous avons pu fournir des vivres et du carburant qui leur manquaient cruellement. Voyant notre dévouement et l’ambiance amicale, ils ont pris volontiers les évangiles et d’autres écrits que nous leur proposions. Ces rescapés ont également posé beaucoup de questions sur Dieu et sur le salut en Jésus-Christ.

Voilà sept années que nous utilisons le “Chasseur”, un véhicule tout terrain financé par l’église de Spaïchingen (D). Durant ce voyage de près de 6300 km, nous avons visité plus de 20 localités, dont Tjoubelech, Soboloch, Chonou, Sajdy, Kebergene, Belaya, Gora, Chokourdach, Dépoutatsky et Ust-Yansk.

Lors des premiers 3500 km, les chemins étaient faits de pierres et de remblais. Le reste du parcours s’est effectué sur des lacs, des rivières et des marécages, le tout étant gelé (l’été, seul l’hélicoptère permet d’atteindre nos objectifs).

Pour la dernière étape, c’est le large fleuve Indigirka (“gens de la tribu Indi”) qui nous a servi de “route”. Par endroits, il traverse des gorges profondes, où l’eau atteint la vitesse de 4 m/sec. Cela signifie que l’épaisseur de la glace n’est pas toujours suffisante…

Parfois le danger provient aussi des hommes. C’est une région où l’on rencontre de nombreux chercheurs de défenses de mammouth. Ici ou là, selon le processus des saisons, ces dernières apparaissent sur la rive des fleuves. Il s’en trouve plusieurs tonnes par an. Le chanceux provoque la jalousie des autres chercheurs, sachant que le kilogramme d’ivoire se vend à au moins 100 $/kg. Alors, dans ces contrées sauvages, un proverbe russe garde tout son sens : « La forêt vierge fait la loi et l’ours en est le procureur, mais c’est le meilleur tireur qui l’emporte ! »

Pourtant, ces personnes ont aussi besoin de l’Évangile. C’est pourquoi les missionnaires se rendent dans ces contrées extrêmes.

“… jusqu’aux extrémités de la terre…”

Après les bouleversements politiques, il y a vingt ans, l’économie yakoute s’est gravement détériorée. De nombreuses localités ont perdu leur rentabilité et sont devenues des villes fantômes. L’absence de perspectives a conduit maintes personnes dans une vie quasi végétative.

Chokourdach, situé non loin de l’embouchure de l’Indigirka qui se jette dans l’océan Arctique, est la dernière agglomération au programme. Comme toute la vingtaine de localités de cette dernière étape du trajet, Chokourdach était un lieu de bannissement pour les opposants au régime soviétique. Ceux-ci, parmi lesquels de nombreux chrétiens – dont Dieu seul en connaît le nombre – ne devaient plus jamais quitter ces lieux sinistres.

Il faut aussi savoir que, ces dernières années, ce “bout du monde” yakoute, zone frontière, se trouve progressivement verrouillé. Des cas se sont produits où des missionnaires locaux ont été condamnés à de fortes amendes. Que cela puisse également être un sujet de prière pour les chrétiens en Occident.

Afin que la véritable lumière se lève

Après les très longues périodes hivernales durant lesquelles règne l’obscurité, le soleil réapparaît en mars pour monter toujours plus haut dans le ciel. L’atmosphère aussi se réchauffe, le thermomètre atteignant les -20°C le jour – la nuit, il oscille entre -30 et -40.

La population salue l’événement avec une immense joie, vouant un véritable culte au soleil. À la fin du mois, on lui sacrifie un renne, le chaman implorant les esprits de leur accorder un été fructueux. En réalité, plusieurs esprits démoniaques sont honorés et invoqués. L’excès d’alcool consommé durant cette période a souvent des conséquences fatales.

Les missionnaires se sont mis en chemin pour proclamer à ces peuples la véritable lumière, Jésus-Christ !

Après la persécution, le réveil

Au début des années 90, on comptait à peine 20 chrétiens parmi la quarantaine de peuples du Grand Nord de la Russie et de l’Extrême Orient. En voici les principaux : Chants, Évenks, Dolgans, Mans, Nenz, Yakoutes… Des centaines de personnes sont venues à la foi durant les deux dernières décennies. Actuellement, seulement pour la Yakoutie, il y a plus de 60 églises et groupes de maisons. Il est étonnant que les gens viennent précisément à la foi en Dieu là où des chrétiens bannis sont morts jadis par milliers. Le gouvernement communiste et athée pensait en finir avec le christianisme. Mais, aujourd’hui, l’Évangile est annoncé dans ces régions en plusieurs langues. Les martyrs du Grand Nord des décennies passées ont été la semence des églises actuelles !

La semence et la moisson

Au retour, pour parcourir les 140 km jusqu’à Sogoloch, nous avons mis trois jours (normalement entre 5 et 7 heures). À plusieurs reprises, la glace a cédé sous notre “Chasseur”. Heureusement l’eau n’était pas trop profonde ! C’est avec étonnement que nous avons vu des frères nous attendre au bord de la route, à Sogoloch, dans la nuit avec leurs lampes de poche. Il faisait -47°C, et ils nous attendaient pour la troisième nuit consécutive ! Ils ne voulaient pas nous manquer. On imagine la chaleur de la communion fraternelle qui s’en est suivie…

Durant nos visites, les années précédentes, plusieurs personnes avaient été délivrées de liens sataniques. Certaines parmi elles doivent encore lutter parfois contre les tentations et le doute. On avait besoin de nos encouragements et des instructions tirées des Écritures.

La graine semée a poussé. Il y a entre 3 et 5 croyants dans de nombreux villages le long de l’Indigirka. Dieu se laisse trouver par ceux qui le cherchent du fond du cœur. Par la suite, ces nouveaux convertis n’ont souvent que très peu de communion avec d’autres croyants. Mais ils prient, lisent l’Évangile et restent fidèles au Seigneur. En parlant avec eux, on remarque qu’ils ont une relation étroite avec Dieu.

Dans un village, les gens nous ont raconté que le plus grand alcoolique avait commencé à lire la Bible après notre dernière venue. Il ne s’est pas encore converti, mais il a changé radicalement sa manière de vivre. Il est le meilleur exemple de l’efficacité de la Parole vivante de Dieu pour ses voisins !

Liés aux ténèbres

La plupart des gens rencontrés sur notre chemin sont des Yakoutes et des Évens. Les Russes et les Ukrainiens vivent principalement dans de plus grandes agglomérations, mais, même là, la proportion des autochtones est de 65 à 80 %. Leurs activités principales restent l’élevage des chevaux et des rennes. Beaucoup vivent aussi de la chasse et de la pêche.

Malgré notre engagement missionnaire répété, il y a encore tant de personnes en Yakoutie qui n’ont jamais entendu parler de la Bonne Nouvelle. Elles sont profondément empêtrés dans le chamanisme, la superstition et l’alcool. Cela concerne beaucoup les gens des villages. On croise partout de nombreux lieux de dévotion aux démons ; les rites ancestraux sont de plus en plus utilisés lors des fêtes populaires.

Une faim non encore apaisée

Il est frappant que beaucoup de gens aspirent à connaître Dieu, souvent sans le savoir. Un homme nous racontait qu’il tient un agenda depuis des dizaines d’années, il analyse chaque soir ses activités de la journée. Puis, il prie Dieu pour le pardon de ses péchés bien qu’il ne sache rien de Lui. Ce n’est que récemment, que des missionnaires lui ont montré comment il peut trouver la paix en Dieu.

D’autres nous ont dit qu’ils font tout pour être sauvés, mais que le poids de leurs péchés les oppressent trop ; ils ne sont pas certains de ce qui les attend après la mort. Avec eux, nous avons ouvert la Bible et lu que l’homme ne reçoit pas le salut par ses bonnes œuvres, mais comme un cadeau gratuit de Dieu, par grâce. Avec certains, nos discussions ont duré parfois jusqu’à sept heures. Ils étaient heureux et voulaient toujours en entendre davantage de la Parole.

Dans certains villages, il y avait jusqu’à 40 personnes qui participaient à chaque réunion d’évangélisation. Nous prêchions et chantions, en langue yakoute, et nous distribuions des Nouveaux Testaments, ainsi que des livres pour les enfants. Dans quelques écoles, les instituteurs et les élèves nous posaient beaucoup de questions sur Dieu et sur la Bible après nos exposés.

Remerciements et sujets de prière

Sur le chemin du retour, un gicleur dans le moteur a lâché. Les réparations étant restées vaines, nous avons parcouru les derniers 1500 km avec les trois cylindres restants. Nous n’avons pas rencontré d’autres difficultés et nous sommes rentrés à bon port dans nos familles. Nous remercions tous nos amis de la mission pour leur aide et leurs prières.

Nous avions prié depuis des années pour que les Yakoutes reçoivent le Nouveau Testament dans leur propre langue Le Seigneur a exaucé, la mission Friedensbote a imprimé 30 000 Nouveaux Testaments, 5000 recueils de chants et de la littérature chrétienne pour parents et enfants.

La brochure en yakoute “Le Chemin du Salut”, financé par la mission, se répand de plus en plus. Cela est d’une très grande importance pour l’évangélisation dans notre pays. Nous avons besoin de moyens financiers pour pouvoir faire imprimer encore davantage de littérature !

Remercions aussi Dieu pour la consécration de nos missionnaires, qui sont prêts à Le servir sans considérer les peines que cela peut coûter. Leurs cœurs brûlent avant tout pour apporter l’Évangile à ceux qui ne l’ont jamais entendu.