Échapper à la malédiction

« Comme il est beau de voir sur les montagnes les pas du messager d’une bonne nouvelle, qui annonce la paix, qui parle de bonheur et qui annonce le salut... » (Es 52.7)
... car Dieu les connaît tous !
“L’amour de Dieu n’a pas de frontières”, telles sont les paroles d’un cantique familier. Ces dernières années, cet amour de Dieu devient de plus en plus évident pour beaucoup de peuples minoritaires en voie d’extinction, largement dispersés dans la toundra et la taïga de Sibérie. Nul n’est capable d’indiquer exactement combien de membres compte chacune de ces petites ethnies, mais Dieu les connaît tous.
Comme œuvre missionnaire nous avons pu, en février dernier, soutenir le voyage de nos amis russes A. Dresvianikov, A. Chlebnikov, et biélorusses P. Telegin et A. Leonovetz. Ils sont allés apporter l’Évangile à des Selkoupes, des Nénètses, des Khantys et à d’autres petits peuples du Nord.
En compagnie de missionnaires locaux, ils ont entrepris leur voyage depuis le chef-lieu de district Noyabrsk. Leur destination était un secteur situé à quelque 750 km plus au nord, dans la région autonome des Nénètses Yamal, qui est d’un accès particulièrement difficile.
Loin dans la toundra, il y a des régions et des sites de peuplement qui ne sont accessibles qu’en hiver avec des motoneiges et des traîneaux ; en été, ils sont environnés de marécages et ne sont que rarement visités par des hélicoptères. C’est là qu’est établi le peuple des Selkoupes, dispersé sur des centaines de kilomètres parmi d’autres ethnies.
Nos amis racontent :
Qui sont les Selkoupes ?

C’est un peuple minoritaire en voie d’extinction qui ne compte plus que 3649 personnes, d’après le recensement de 2010, et la tendance est à la baisse. À la suite de l’influence russe, quelques Selkoupes se sont sédentarisés au 16e siècle, mais aujourd’hui encore la majorité d’entre eux sont des éleveurs de rennes nomades, vivant dans des “tchums” (tentes en peaux de renne). Ils chassent l’écureuil, le renard polaire, dont ils vendent les fourrures. Leur nourriture consiste en viande de renne et en poissons crus. Avec les arêtes des poissons, ils font de la farine qu’ils mangent ainsi. Tout cela constitue leur pharmacopée naturelle qui contient des protéines, des acides aminés rares, du phosphore, du calcium, du fer et diverses vitamines.
Plus de tombes que d’habitations
Malgré la viande de renne riche en vitamines, les Selkoupes ont une espérance de vie moyenne de 42 ans. Le taux de personnes infectées par la tuberculose est cinq fois plus élevé que la moyenne russe. De plus, les Selkoupes sont profondément pris dans le chamanisme et dans des coutumes occultes. Parmi les marchands ambulants de fourrures et de poissons, la dépendance de l’alcool est devenue un grand problème supplémentaire. L’alcool est un don offert aux idoles. On le fait avaler même aux nourrissons, quand on les consacre aux idoles (c’est-à-dire aux démons).
Sous l’influence de l’alcool, les hommes en particulier en viennent vite à de cruels affrontements, car ils sont tous armés. Dans un village, les habitants nous ont rapporté que celui-ci comptait autrefois 160 maisons ; aujourd’hui, il n’en reste que le quart. Quant au cimetière qu’ils nous ont montré, il s’est étendu d’autant.
Quelques jours avant notre visite, trois personnes, dont un bébé, sont mortes de mort violente. Cela nous a fait une fois de plus mesurer l’urgence de présenter l’Évangile à ces gens désemparés et désespérés.
Dans les chaînes de Satan
Un Selkoupe nommé Nahoum nous a demandé de lui apprendre à prier. Puis il a littéralement crié à Dieu de lui faire grâce. Deux femmes nous ont dit : « Nous donnons le sein à notre enfant, mais nous fumons cigarette sur cigarette. S’il vous plaît, priez pour nous pour que nous en soyons libérées. »
Dacha, une autre femme, était incapable d’aligner un mot après l’autre. En parlant avec elle, nous nous sommes aperçus qu’elle avait demandé de l’aide à une chamane pour divers besoins. Depuis lors, elle ne cesse de blasphémer malgré elle.
Nous avons été surpris de constater que les gens nous suivaient de maison en maison, pour en apprendre encore davantage sur Dieu. Comme tout était nouveau pour eux et qu’ils entendaient pour la première fois parler d’un Dieu qui les aime et qui, de plus, a donné sa vie pour leurs péchés, ils ne tarissaient plus de questions. De ce fait les entretiens ont souvent duré plusieurs heures.
« Pouvons-nous échapper à cette malédiction mortelle ? »
Nous avons expliqué aux gens que seul Jésus peut les libérer. Nos cantiques et les sons mélodieux de notre accordéon ont attiré de nombreux auditeurs. Nous avons vu l’agressivité des Selkoupes disparaître quand ils ont entendu nos cantiques et ils se sont mis à pleurer. Cela faisait penser à l’épisode biblique où le mauvais esprit quittait Saül, lorsque David jouait de la harpe. Cet incident nous a clairement montré l’importance qu’il y a pour nous chrétiens de choisir des cantiques et de la musique réellement spirituels.

Nous avons entrecoupé les chants par la lecture de quelques textes bibliques, en nous efforçant de présenter la voie du salut de la manière la plus simple possible. Comprenant exactement la gravité de leur situation, de nombreux Selkoupes nous ont demandé de prier pour eux. Plusieurs ont dit : « Nous sommes sous une malédiction. Nous sommes dans l’impasse et ne voyons pas d’issue ! » C’était une grande joie pour nous d’expliquer à ces gens qu’il n’existe qu’une porte pour sortir de leur impasse : Jésus-Christ, et que chacun d’eux pouvait échapper à l’esclavage en passant par cette porte (Jean 10.9).
Remercier Dieu même pour la fatigue
Au cours de nos voyages nous avons tout spécialement pris conscience de la protection de Dieu. Se déplacer dans la toundra, c’est passer de bosse en bosse. Quand on est assis sur le traîneau remorqué par le motoneige, on se sent bien plus mal à l’aise que sur un grand huit ! On se fait même éjecter de temps en temps. En plus, les passagers du traîneau doivent respirer les gaz d’échappement du motoneige. Par endroits, il nous fallait franchir de petits fleuves qui n’étaient pas gelés, même par -30°. La gadoue faite de neige et d’eau brunâtres des marais gorge les vêtements d’humidité et on a rarement l’occasion de les sécher.

Après 400 km de trajet, brusquement la dernière courroie de transmission de notre motoneige s’est rompue. Dimitry, le missionnaire local a pâli ; le site habité le plus proche était à plus de 40 km et, par ce froid intense, nous n’avions guère de chance de survivre. C’est alors que Dimitry s’est souvenu qu’il avait encore une vieille courroie effrangée dans la boîte à outils. Cela nous a sauvés. C’est en roulant avec beaucoup de précaution et en faisant d’ardentes prières que nous sommes parvenus à destination ! Selon leur coutume, les gens de l’endroit, très hospitaliers, nous ont alors servi de la viande crue de renne et du poisson gelé.
Tout cela nous a fait prendre conscience, une fois de plus, de l’aisance dont nous jouissons chez nous. Dimitry nous a dit : « J’ai appris à remercier Dieu même pour l’énorme fatigue, car c’est alors que tu comprends bien mieux ce que tu es, c’est-à-dire rien du tout. Alors tu es SEULEMENT dépendant de Lui ! »
Inoubliables rencontres
Entre les colonies de Selkoupes et de Khantys vivent aussi des Nénètses nomades. Des rencontres antérieures nous avaient déjà fait connaître un certain nombre d’entre eux, tandis que nous en avons vu d’autres pour la première fois. À la suite des voyages missionnaires de l’année précédente, certains s’étaient convertis ou étaient prêts cette fois à accueillir de bonne grâce la Parole de Dieu et à nous recevoir avec chaleur.

Avant le départ, nous avions fait provision d’objets utiles pour ces contrées désolées : des vivres, des chaussettes, etc., que nous avons maintenant remis en cadeau aux familles visitées. L’une d’entre elles était assise autour d’une petite lampe à pétrole, tandis qu’Alla, la maîtresse de maison, cuisait du pain. Comme il faisait trop sombre, plusieurs pains ont brûlé, ce qui a rempli la pièce de fumée. Nous leur avons offert une lampe de poche pour permettre ainsi à Alla de cuire son pain, sans le brûler. Ils en furent très heureux. Ce ne sont apparemment que de petites choses, qui justement ont créé de bonnes occasions pour aborder des questions spirituelles.
Souvent nos entretiens se sont prolongés tard dans la nuit. L’heureuse conclusion était alors les prières de ces gens qui demandaient à Dieu de leur pardonner leurs péchés. Dans une famille, trois personnes se sont converties : Pavel, le père, Tatiana, la mère et Stas, leur fils. Nous nous sommes émerveillés de l’action du Seigneur Jésus, car c’est justement cette famille qui passait pour particulièrement violente dans toute la région. Leur fils aîné purge actuellement une peine de prison de plusieurs années pour un assassinat cruel. Dieu venait de leur offrir un nouveau départ.

L’été dernier le vieux Vassili (82 ans) s’est fait baptiser par Nicolaï Rychouk, de Biélorussie. Il était le premier Khanty de son village à franchir volontairement cette étape. Aujourd’hui, nous pouvons célébrer des cultes dans sa maison. Son peuple le tient en haute estime et les gens viennent volontiers le voir. Son nouveau mode de vie est un témoignage marquant, en particulier auprès de ses proches. Andreï, son petit-fils, est venu en larmes demander à Dieu de lui pardonner. Demander pardon à genoux est un geste spécial, car il exprime une totale soumission.
Au culte, était présent ce jour-là un jeune homme appelé Micha. Il n’était pas sous l’effet de l’alcool, ce qui pour la partie masculine de la population est très rare ici. Nous avons été frappés de voir notre prédication se refléter sur son expression. Nous n’avons pas souvent trouvé un auditeur aussi attentif dans une communauté. À la fin, il est venu nous dire :
« Je ne cesse d’entendre le même message. Mes beaux-parents sont déjà croyants et cela les a complètement transformés. Tout cela me fait réfléchir et je comprends que moi aussi, il faut que je change certaines choses. Priez pour moi ! »
En pleine forêt, nous avons rencontré un couple russe établi dans une station météorologique. Tous deux nous ont posé quantité de questions sur Jésus. Quelqu’un leur avait donné des images avec des versets bibliques tirées d’un calendrier chrétien et ils en avaient décoré leurs murs. Ils nous ont expliqué : « Ces paroles réchauffent notre âme dans ce pays si froid et si dur ». Lorsqu’en les quittant nous leur avons promis de prier pour eux, les larmes leur sont montées aux yeux : « Pourquoi faites-vous cela ? Vous ne nous connaissez même pas ! »
Cela nous a rappelé notre Seigneur Jésus qui est mort pour nous, alors que nous ne le connaissions pas. Bien plus : nous étions même ses ennemis ! Et pourtant son amour divin l’a conduit à le faire. C’est ce même amour qui nous donne aujourd’hui la force de surmonter toutes les circonstances contraires pour apporter aux gens d’ici le message salvateur de l’Évangile.
Un terrain préparé
À intervalles réguliers, il nous fallait retourner au village d’Uwat, sur les bords du fleuve Irtych, pour faire provision de vivres et de carburant pour les motoneiges. C’est là que vit le missionnaire Dimitry Manikov avec sa famille.

La consécration de ces derniers nous a profondément impressionnés. Dimitry invite chez lui, dans sa maison, prati-quement chaque Khanty qu’il rencontre. Généralement, les Khantys répondent sans délai ni hésitation à une telle invitation. C’est ainsi que depuis de longues années cette famille a presque tous les jours la visite simultanée de huit à dix Khantys.
Avec l’aide de la mission Messager de la paix, Dimitry a acheté un conteneur aménagé dans lequel les visiteurs peuvent désormais passer la nuit. Mais, avec leurs neuf enfants, ce n’est pas simple du tout d’avoir toujours chez eux des personnes inconnues, parfois même prises d’alcool. Soutenons cette famille dans la prière !
Pendant des heures, Dimitry parle avec ses visiteurs de leur vie et de Dieu. Bien des Khantys que nous avons rencontrés dans la toundra, se souvenaient avec reconnaissance de Dimitry, chez qui ils avaient déjà entendu l’Évangile. C’est ainsi qu’il nous est arrivé, bien des fois, de trouver un terrain tout prêt pour notre prédication.
Merci pour votre soutien !
Nous étions très conscients de l’amour de nos nombreux frères et sœurs de l’Ouest qui ont prié pour nous et ont assumé le financement de nos actions étendues sur un parcours de 2500 km. Sans ce soutien ce travail missionnaire n’aurait pas été possible. Veuille le Seigneur Jésus vous bénir abondamment pour le service que vous avez ainsi rendu à ces personnes dans une si grande détresse spirituelle.
A. Dresvianikov et P. Telegin