Une clinique chrétienne en Moldavie

La mission FriedensBote, soutient la clinique Emmanuel, en Moldavie, depuis plusieurs années. Lors des journées de la mission, l’automne dernier, en Allemagne et en Suisse, le directeur de la clinique, Liviu Gusak, exposa les origines de l’œuvre et relata comment Dieu l’a utilisé ces dernières décennies pour sauver des âmes.
Christ appelle Lévi à son service… en Moldavie

Traduit en hébreu, mon prénom Liviu se prononcerait Lévi. Cela me rappelle à chaque fois le péager de la Bible (cf. Marc 2.14: "En passant, Jésus vit Lévi, fils d’Alphée, assis au bureau des péages. Il lui dit : Suis–moi. Lévi se leva, et le suivit."). Et si l’on veut être franc, la vie de chacun d’entre nous ressemble à celle de ce Levi. Il vivait sans Dieu dans ce monde, et il cherchait essentiellement son propre intérêt jusqu’à ce que Jésus l’appelle à le suivre. Il en va de même pour nous. Jésus-Christ m’a parlé au travers de sa parole, la Bible, et Il m’a racheté de mes péchés. Il m’est permis maintenant de le servir depuis 25 ans, en Moldavie où je vis, ainsi qu’en Ukraine, en Biélorussie et en Sibérie. Tout ce que nous vous partageons, doit servir à glorifier notre Sauveur Jésus-Christ, et à Lui rendre grâce comme il convient.
La Moldavie, un pays dévasté

La Moldavie est située entre la Roumanie et l’Ukraine. Sa superficie est de 33 843 km2, soit comparable à celle de la Suisse, avec une population d’environ 3 millions d’habitants. En même temps que le mur tombait en Allemagne de l’Est, il y eut des changements en Moldavie : le système communiste de l’Union soviétique se disloquait. Malheureusement, nous ne sommes pas parvenus à sortir de l’état chaotique dans lequel se trouve notre pays depuis.
C’est pourtant ce chaos qui nous a conduits à entreprendre notre service. Nous avons survécu à trois crises financières depuis la fin des années 80. Au début des années 90, la valeur de l’argent s’est effondrée. Par la suite, l’argent russe fut converti dans de prétendus titres, et ceux-ci à leur tour en lei (la monnaie moldave) en 1992. Ces changements financiers ont conduit les Moldaves à perdre leur épargne. La troisième crise est apparue, il y a deux ans, quand un milliard d’euros a disparu des caisses de l’État pour des raisons inconnues. Cela représente environ 13% du budget et a entraîné des sanctions de la part de la Banque mondiale, ainsi que de la Communauté européenne.

La conséquence de ces problèmes est un appauvrissement de l’ensemble de la population du pays. La Moldavie est le pays le plus pauvre d’Europe.
Comment seulement survivre à cela ?
On peut répartir la population en quatre groupes, chacun essayant de survivre à sa façon. Le premier groupe a quitté le pays pour travailler à l’étranger. Cela concerne plus d’un million de personnes, soit le quart de la population. Le second groupe est constitué par les enfants de ces travailleurs partis à l’étranger, ils vivent pour la plupart chez les grand-parents ou dans la famille éloignée. Ils sont en partie livrés à eux-mêmes et vivent souvent dans la rue.


Comme il y a peu d’industrie dans notre pays, c’est essentiellement l’agriculture qui nous fait vivre. Ce sont surtout des paysans et des commerçants qui composent le troisième groupe, mais comme les revenus continuent de diminuer, beaucoup sont contraints de tenter aussi leur chance à l’étranger. Le dernier groupe est constitué des fonctionnaires de l’État ou des collectivités publiques ; ils doivent pour la plupart occuper un deuxième emploi, car le petit salaire mensuel d’environ 100 à 200 € ne suffit pas pour vivre. Il y a aussi les retraités qui disposent d’une pension qui est souvent faible : entre 40 et 100 euros. Quand on connaît les prix : environ 0,80 € le 1 kg de riz, 7 € les 25 kg de pommes de terre, 13 € le kg de grains de café, 1,40 € les 2 Litres de lait, on comprend que plus de 50% des gens vivent sous le seuil de pauvreté.
Dans la misère, l’homme crie vers Dieu
Aussi longtemps que l’homme vit dans l’opulence et le bien-être, il se dit : « Pourquoi aurais-je besoin de Dieu ? ». Quand l’économie du pays s’est effondrée, l’amour de Dieu s’est manifesté aux hommes par l’intermédiaire de son Église. Au fil des années, beaucoup de personnes ont entendu la parole de Dieu lors des campagnes d’évangélisation publiques. Elles ont ouvert leur cœur au Seigneur Jésus, et s’impliquent désormais totalement pour Le servir.
Les gens devenus croyants sont issus des classes sociales les plus diverses. Beaucoup sont instruits : ingénieurs, enseignants et médecins. C’est aussi mon cas et celui de mon épouse Ina. Dieu a dirigé les choses de telle sorte que quelques médecins commencent à se rencontrer quotidiennement pour étudier la Bible. Dieu nous a ensuite mis à cœur de partager l’Évangile avec les personnes qui bénéficiaient de nos soins. Nous apportions une aide médicale tout en annonçant la Bonne Nouvelle de l’Évangile. Nous aidions celles qui souffraient et nous réconfortions celles qui se trouvaient dans un état médical grave. Cela fait maintenant 25 ans que nous avons commencé ce travail, n’étant qu’un petit groupe au début.
« Je ne veux pas tuer mon enfant ! »
Au début des années 90, un événement particulier a été déterminant pour notre engagement total au service du Seigneur. Les anciens d’une assemblée nous ont demandé de rendre visite à une sœur en Christ qui se trouvait à l’hôpital. Elle s’était convertie au Seigneur depuis peu avec son époux. Cette sœur était encore jeune et pourtant sa maladie était considérée comme incurable. Elle devait prendre des médicaments très forts, et elle était aussi enceinte. Les médecins se prononçaient pour un avortement, question de survie… Ne sachant plus que faire, elle demanda conseil auprès des anciens de son église. Ils nous ont alors priés de parler aux médecins de l’hôpital.
La sœur nous dit : « Je ne veux pas tuer mon enfant ! Que dois-je faire ? » Nous l’avons soutenue dans sa décision. Mais les médecins lui disaient : « Si tu n’avortes pas, nous te renvoyons de l’hôpital. Nous ne voulons pas que tu meures ici. » Que devions-nous faire ? Nous nous sommes agenouillés au pied du lit et nous avons prié Dieu en présence des médecins (certains d’entre eux avaient même fait leurs études avec moi). Après la prière, ils nous ont dit : « Vous êtes complètement fous, à quelle secte appartenez-vous ? Vos prières ne sauveront pas cette femme ! ». Telle était l’interprétation médicale et la jeune femme fut renvoyée chez elle. Mais nous avons pu obtenir qu’elle soit transférée à la maternité. La surprise des médecins était sans borne quand elle mit au monde un bébé bien portant quelque temps plus tard, et qu’elle-même se trouva totalement rétablie ! Dieu était directement intervenu pour rétablir son honneur !
Les médecins aussi doivent apprendre la patience
Nous avons commencé à prier pour la bénédiction de Dieu sur un projet d’ouverture d’un centre médical chrétien dans lequel nous pourrions soigner les personnes selon les principes de la Bible. D’autres frères et sœurs eurent connaissance de notre projet, de sorte que plusieurs églises se joignirent à nous dans la prière !
Nous devions apprendre à être patients : nos prières furent continuelles durant cinq années. Puis, une église nous proposa une parcelle de terrain dans la capitale Kichinev. Une bâtisse à moitié en ruine s’y trouvait déjà. Nous l’avons démontée totalement jusqu’aux fondations et nous avons érigé une autre construction dans les années 1996-1997 avec l’aide de chrétiens des Pays-Bas.
Depuis cette époque, les médecins chrétiens font briller la lumière de l’Évangile qui rayonne de ce centre.







Le service multifonctionnel de la clinique
Dieu nous a indiqué comment exercer notre mission dans quatre domaines :
- nous pouvons fournir dans notre centre médical des prestations médicales très qualifiées en neurologie, ORL, pharmacie, dermatologie, gynécologie, cardiologie, dentaire et pédiatrie ;
- l’aide sociale et l’accompagnement spirituel pour les cas graves ;
- des séminaires médicaux et spirituels pour les collègues médecins non chrétiens et les étudiants (il est important pour nous de leur faire comprendre que les problèmes corporels et physiques dépendent souvent de problèmes liés à l’âme, et qu’il est donc absolument nécessaire de s’en remettre à Dieu dans leur vie). Ces conférences ont lieu pendant les jours fériés ou les congés légaux ;
- le soutien des médecins implantés localement grâce aux interventions sur le terrain du personnel permanent de la clinique.
Le but premier de la clinique
Les différents services de la clinique peuvent se résumer en un objectif : montrer l’amour de Dieu à ceux qui s’approchent de la fin de leur vie, abandonnés par leur propre famille et sans la moindre ressource pour subsister.
Notre service itinérant apporte des soins médicaux, prépare les repas et lave le linge des personnes dans le besoin. En raison de maladies prolongées, certains n’ont pas respiré l’air de dehors depuis des années ; ils ont là une occasion de faire une petite promenade et d’entendre parler de Dieu.
Mais, en plus de cela, les équipiers prodiguent des soins pastoraux. L’étonnement des malades est grand quand nous leur expliquons que la maladie est la conséquence amère du péché, et beaucoup d’entre eux, dans les derniers moments de leur vie, acceptent Jésus-Christ comme leur Sauveur.
Même les officiers du KGB ont besoin de Dieu
Parfois, on se demande pourquoi Dieu nous conduit vers certaines personnes en particulier. Les patients que nous rencontrons sont très différents les uns des autres, dont cet ancien officier du KGB (ex-services secret) : arrivé à la retraite, il s’est rendu compte qu’il n’était plus utile à personne. Autrefois, il était officier, maintenant il n’était plus qu’un malade, solitaire. Tous ses anciens amis avaient subitement disparu, sa famille était déchirée, et il se retrouvait totalement démuni. Dans son désespoir, il avait écrit une lettre au Gouvernement pour demander de l’aide. Celui-ci nous transmit cette lettre. Lorsque nos médecins se présentèrent à son domicile et qu’il apprit que nous étions chrétiens, il refusa notre aide en disant : « Moi qui vous ai poursuivis toute ma vie, qui vous ai envoyés en prison !… C’est moi que vous venez voir maintenant pour me proposer de l’aide au nom de Dieu ? Je refuse de recevoir une aide aussi pitoyable de la part de chrétiens ! »
Ce n’est qu’après plusieurs longues discussions qu’il s’est montré prêt à accepter notre main tendue. Alors notre équipe eut le privilège d’être témoin d’un miracle : non, il ne recouvra jamais la santé, mais nous avons pu l’entendre répéter en pleurant : « Est-ce possible que Dieu m’ait tant aimé qu’Il se serve de vous encore maintenant, à la fin de ma vie, pour m’envoyer un message d’amour ? » Il s’est tourné vers Dieu deux mois avant sa mort.
Nous avons été témoins de bien de cas semblables. Nombreux sont ceux qui reconnaissent que Dieu leur envoie une dernière lueur d’espoir et de grâce. Plusieurs de ces malades étaient paraplégiques, mais ils ont tenu à témoigner de leur foi par le baptême ; ils ont été baptisés chez eux, dans une baignoire.
Tout ce que ta main trouve à faire, fais-le (Ecclésiaste 9.10)
Notre centre compte aujourd’hui 28 médecins, 12 infirmières et de nombreux bénévoles. Lorsque nous l’avons ouvert, nous étions seulement huit médecins, mais au cours du temps, une vingtaine de médecins se sont convertis et sont devenus enfants de Dieu. Grâce à notre activité dans la durée, notre service s’étend peu à peu à toute la Moldavie ; partout, des assemblées locales s’impliquent avec nous.
Notre équipe comprend quatre anciens d’église. Nous commençons chaque journée de travail par un moment de prière en commun, à 7h45. Dès l’admission, les patients entendent le message de l’Évangile et, durant la consultation, les médecins leur parlent de Dieu.
Je suis médecin O.R.L. et, en parallèle avec la direction de notre centre, je travaillais encore comme chirurgien dans un hôpital public. Nous sommes très reconnaissants à la mission FriedensBote pour l’électrocardiographe et les deux minibus que nous utilisons comme ambulances. Ils nous sont d’une grande aide.
Quand 75 centimes doivent suffire…
Jusqu’à l’année dernière, nous avons régulièrement reçu des médicaments de l’étranger. Mais, depuis 2016, ce n’est plus possible car selon les nouvelles réglementations une licence est nécessaire pour toute boîte de médicaments. Nous devons donc trouver des fonds supplémentaires pour acheter ces remèdes. Nous avons également grandement besoin de couches pour adultes.
Beaucoup de malades n’ont pas la moindre famille et ne peuvent quitter leur lit en raison de leur état physique. Le Ministère de la Santé alloue une aide ( !…) de 0,75 € par mois pour la prise en charge d’un malade, une somme qui doit permettre de payer le médecin, l’infirmière et les médicaments ! Tout ce qui dépasse ce montant doit être réglé par le malade lui-même, ce qui est bien entendu au-dessus de ses moyens.
Ceci explique pourquoi, ces dernières années, l’espérance de vie a chuté à 60-62 ans pour les hommes et à 66-68 ans pour les femmes.
Notre clinique accueille toute personne, d’où qu’elle vienne du pays, mais nous assistons en priorité celles dont les ressources sont particulièrement faibles.
Ces personnes sont souvent émues aux larmes lorsqu’elles reçoivent notre aide, sous quelque forme que ce soit. Nous avons comme principe de soigner les personnes gravement malades durant six mois, le temps que leur état soit stabilisé ; mais après ce délai, vu la très forte affluence, nous devons souvent les abandonner pour pouvoir accueillir de nouveaux patients. Pour certains, c’est une véritable tragédie : « Comment pouvez-vous nous abandonner ainsi ? », nous demandent-ils. Ce qui est bien, c’est quand il y a une assemblée dans leur ville, car des chrétiens peuvent les visiter.
La clinique mobile apporte l’Évangile


Nous nous rendons là où l’on nous signale des besoins. Les patients nous attendent dès avant notre arrivée. Sur place, nous nous présentons et exposons comment nous avons rencontré Dieu. Puis nous prions avec les malades avant de nous répartir dans différentes pièces mises à disposition et prodiguons nos soins individuellement. Au cours d’une telle intervention, nous soignons jusqu’à 200 personnes qui reçoivent chacune un Nouveau Testament.
Des lanceurs de pierres ont la parole coupée
Dans un village de la Transnistrie (petite république le long de la frontière est de la Moldavie), une modeste église se réunissait dans une maison privée. Toujours, le prêtre orthodoxe excitait des gens qui brisaient les vitres au moment du culte et démolissaient le portail, le tout sous l’œil complaisant du maire.
Un jour, nous avons demandé à ce dernier l’autorisation de visiter son village pour proposer des soins gratuits à la population. Il nous invita, de même que le prêtre, pour le repas de midi. Le maire nous demanda comment il se faisait que nous agissions ainsi. Apprenant que nous appartenions à la même confession que la petite église du village, ce fut la consternation ! Après un échange prolongé de paroles, le maire dit au prêtre : « Prends exemple sur ces chrétiens et laisse-les accomplir leur si bon service ! ».
Aujourd’hui, la petite église prospère et l’animosité de la part des orthodoxes a disparu.

Soyons une bonne odeur de Christ
“Nous sommes, en effet, pour Dieu le parfum de Christ, parmi ceux qui sont sauvés et parmi ceux qui périssent” (2Corinthiens 2.15).
Ce verset nous a beaucoup encouragés. Notre vocation est d’être de bons témoins de Christ partout où nous sommes, aussi bien dans nos foyers qu’à notre lieu de travail, dans la société et à l’église. Nous ne pouvons pas cacher ce qui nous anime. Si je prétends être chrétien, mes actes doivent correspondre à mes paroles. Il en est justement ainsi de notre tâche en tant que médecins au centre médical chrétien.
Cela dure depuis 18 années et nous sommes reconnaissants à Dieu de nous avoir préservés jusqu’à ce jour, face au vent contraire de la part des autorités qui ont déjà essayé, à plusieurs reprises, de fermer la clinique, parce que nous disons à tous que nous faisons tout cela au nom de Jésus-Christ. Nous sommes également reconnaissants à tous les chrétiens qui ont prié pour nous durant toutes ces années !
Liviu Gusak - Moldavie.