donnez-leur vous-mêmes à manger

Quand les rêves deviennent réalité

Le frère Chepel aura 70 ans cette année. Il habite Tcherkassy, une ville ukrainienne importante de 311 000 habitants, à 160 km au sud de Kiev, la capitale.

Nikolaï et son épouse Katharina ont 8 enfants et 17 petits-enfants. Après une vie pleine d’épreuves, ils pourraient s’accorder une retraite paisible bien "méritée". Au lieu de cela, Nikolaï est sans cesse en déplacement avec son équipe d’évangélisation sur un territoire de 20 900 km², presque aussi étendu que la Lorraine. Notre collaborateur de Friedensbote, Edouard Ewert,  de même que Louis et Marie-Thérèse Pelzer, de la Mission Le Messager de la Paix, lui ont rendu visite.

Prières et projets en détention

Les persécutions faisaient encore rage dans notre pays, qu’après ma première détention d’un an et demi à cause de la proclamation de l’Evangile, je fus de nouveau condamné en 1984 à trois ans d’emprisonnement. Nos persécuteurs voulaient “en finir” avec nous !

Encore en prison, je demandais à Dieu la liberté religieuse et je planifiais l’organisation de l’annonce de la Parole de Dieu dans ma région. Je désirais avant tout prêcher l’Evangile à des endroits où il n’était jamais parvenu. Mais rien ne laissait encore entrevoir la liberté.

Nouveaux défis

Le changement du début des années 90 apporta aux chrétiens la liberté tant attendue. Ils étaient désormais placés devant de nouveaux défis.

A ma question à l’église : « Qui veut se consacrer à plein temps à l’évangélisation ? » deux frères répondirent à l’appel : Andrei T. et Paul S. Avec divers groupes de jeunes, mais souvent aussi à deux, nous avons sillonné quotidiennement notre région apportant l’Evangile. Le village le plus éloigné se situe à 150 km. D’abord, nous visitions régulièrement huit villages.

En été, le travail était plus facile dans les nouveaux villages. Les gens se rassemblaient tout simplement dans la rue. L’hiver, dans quelques villages, on nous accordait de parler aux personnes intéressées, dans le magasin communal durant une demi-heure.

En général, rien ne se passait la première année. Les gens avaient beaucoup de raisons d’être méfiants. Mais, peu à peu, leur confiance augmentait, voyant que nous ne venions par pour un profit matériel.

Puis, viennent les premières questions : « Comment obtient-on le pardon des péchés ? », « Comment faut-il vraiment prier ? », etc. Bientôt les premiers se convertissent ouvrant leur cœur à Dieu et à nous, et leur maison pour célébrer des cultes. Malgré une grande pauvreté et des locaux minuscules, les cercles de maison grandissent.

Beaucoup de personnes souffrent du chômage, de l’alcoolisme, de la drogue, de l’occultisme ou de la débauche. Les taux de suicide augmentent constamment. J’ai formé quelques chrétiens doués pour la cure d’âme. Grâce à Dieu, nous avons pu être les témoins de délivrances des puissances occultes.

36 points d’appuis pour l’Evangile

En cinq ans, ce travail a permis la naissance de 36 assemblées et cercles de maison. L’église la plus importante compte aujourd’hui près de 40 membres. Grâce à l’aide de la Mission Friedensbote, nous avons pu acquérir de modestes bâtiments pour les groupes les plus nombreux.

Mensuellement, de bons professeurs d’écoles bibliques assurent deux journées de formation (exégèse et homilétique) pour des prédicateurs débutants qui viennent nous rejoindre à Tcherkassy. Cinq frères ont déjà été nommés anciens. Mais le besoin d’ouvriers consacrés reste très grand.

Le fils fugueur du procureur devient responsable d’un cercle biblique

Au cours de l’un de nos cultes à Tcherkassy, un jeune homme, prénommé Peter, se convertit à Jésus. Son père était procureur dans la petite ville de Tchiguirin. Dans sa jeunesse, Peter avait fugué de sa maison familiale.

Puis Peter est baptisé, il étudie la Bible et retourne dans son foyer. Un cercle biblique s’y développe devenant une petite assemblée. Il y a trois ans, une petite maison a pu être acquise au centre-ville pour 3500 € grâce à nos amis de la Mission Le Messager de la Paix de France. Un autre cercle biblique a bientôt vu le jour dans la commune voisine.

"Qu’avez-vous fait de mon petit-fils ?"

Quatre fois en un mois, notre église de Tcherkassy a organisé des réunions pour enfants à quatre endroits différents de la région. Nous les invitons par des affiches et des tracts portant l’inscription : « Amène ton copain ! » Le nombre d’enfants qui ont répondu à l’appel a de loin dépassé nos attentes.

Près de 80% des enfants étaient amenés par des parents incroyants. Certains venaient de régions éloignées suite aux bons témoignages rapportés sur notre travail.

Issus de familles très pauvres, les enfants sont souvent mal soignés et les vêtements abîmés. Une petite fille venait en habits d’hiver par 40°! Quelle joie immense de recevoir de bons et beaux habits de la Mission.

La charge est grande pour les moniteurs, mais l’occasion est merveilleuse de semer l’Evangile dans ces jeunes cœurs. La grand-mère d’un enfant particulièrement difficile nous dit plus tard : « Je ne sais pas ce que vous avez fait à mon petit-fils, mais il a changé. Il jurait horriblement et n’obéissait pas. Dites-moi, s’il vous plaît, quand commence votre école du dimanche. Il faut qu’il y participe. Je sais que chez vous il est dans de bonnes mains ! »

Applaudissements après les baptêmes

Les habitants incroyants du village de Kalinoir Most n’avaient encore jamais assisté à un baptême. Placés autour du petit étang dans lequel nous avons baptisé les trois nouveaux convertis du village, ils ont applaudi spontanément après le dernier baptême, tant la solennité de l’événement, les chants et les visages rayonnants de joie des chrétiens les ont réjouis.

A Tcherkassy, une jeune candidate au baptême avait un père incroyant très agressif envers les chrétiens. Il a menacé d’empêcher le baptême de sa fille de façon brutale. L’exaucement des prières s’est accompli au bord de l’eau : le méchant homme a demandé pardon à sa fille et à tous les assistants !

Les prêtres orthodoxes interdisent aux villageois tout contact avec nous. C’est pourquoi tout ce qui n’est pas orthodoxe est refusé catégoriquement et le contenu du vrai Evangile reste ignoré. Cependant, là où des conversations libres ont lieu, les gens commencent à réfléchir au sens de l’Evangile. Ils se convertissent et s’épanouissent.

Youri et Lena, de Celo Gladkivchina

Lors de notre première visite, ni même pour la deuxième, aucun des habitants du village de Gladkivchina ne voulait nous écouter. Que se passait-il ? « Seigneur, nous avons pourtant prié avant de venir. Ces gens ont besoin de toi. »

C’était l’hiver et il faisait horriblement froid. Bien pire était la froideur et l’indifférence des gens. Rares étaient ceux qui ont accepté nos d’invitations, mais aucun ne voulait y répondre positivement.

Lors de la troisième visite, Lena, une jeune femme, qui se tenait près de nous, veut savoir pourquoi nous revenions toujours. Suite à notre explication, elle nous demande une Bible pour enfants.

Au cours de notre quatrième visite, Lena reçoit la Bible demandée. Dans sa joie elle nous invite spontanément dans sa maison.

Là, se trouve Youri, son mari, le visage portant les traces de ses dernières beuveries et d’une récente bagarre. Lorsque Youri apprend qui nous sommes, il prend un livre de l’étagère et nous le tend. Nous sommes étonnés : c’était une Bible dans laquelle des versets étaient soulignés presque à toutes les pages. Il s’y trouvait aussi des remarques et des points d’interrogation. C’était un vrai livre d’études.

Youri et Lena nous racontent alors qu’ils lisaient depuis longtemps la Bible de façon approfondie. Ils avaient aussi écouté diverses émissions chrétiennes à la radio, mais ils ne parvenaient pas à accorder certains messages de la radio avec la Bible, et ils ne savaient pas qui pourrait leur apporter les éclaircissements nécessaires. Ils avaient même prié pour que Dieu leur envoie quelqu’un.

Dès ce jour-là, nous tenons régulièrement nos réunions d’évangélisation chez Youri et Lena. Des personnes de plus en plus nombreuses y assistent.

La mère de Youri était l’adjointe au maire du village. Sa curiosité aiguisée par l’enthousiasme de son fils, elle fréquente nos réunions assidûment et avec un intérêt croissant. Sa conversion intervient un an plus tard et elle est baptisée en témoignage de sa foi en Jésus. Bientôt, elle démissionne de son poste, sa conscience étant reprise par tous les compromis qu’on attendait de sa part. L’étonnement est grand chez de nombreux villageois, car elle abandonne un travail sûr pour se retrouver maintenant au chômage.

Peu de temps après cela, ce sont la mère et le père de Lena, ainsi que celui de Youri qui se convertissent. Aujourd’hui, le père de Youri affiche un sourire honteux à la pensée de son passé insensé, alors qu’il menaçait les gens en pleine rue en criant à tue-tête : « Je vais mettre le feu à votre auto ! Je vais crever vos pneus ! » Aujourd’hui, il est responsable du service diaconal dans la petite assemblée, il lit beaucoup la Bible et a toujours plein de questions.

Comment Dieu est glorifié par l’aide humanitaire

On ne peut pas se représenter l’importance de l’aide humanitaire pour les pauvres villageois ! Grâce aux dons de la mission Friedensbote, nous avons offert cinq vélos à Youri et à d’autres membres de l’église. Ces vélos sont devenus des sujets de conversation au village. Même nos plus bruyants ennemis ont compris que nous ne recherchions pas notre profit personnel.

Un jour, parmi les dons provenant de la mission j’ai trouvé des chaussures d’hiver convenant à Youri. Je les lui ai données. Soudain ses yeux se sont remplis de larmes. Il me dit : « Mes chaussures sont entièrement usées. Tout ce qui me reste, ce sont des snow-boot de jardin. Les chaussures sont très chères et je suis au chômage. Tu ne peux pas t’imaginer ce que ce cadeau représente pour moi. Dieu est une réalité. Je le prie et il me répond ! »

Je m’apprêtais à donner un vieux réfrigérateur à des nécessiteux et j’ai demandé à Youri s’il en aurait besoin. « Je prie depuis plus d’un an pour cela ! » Son père, qui n’était pas encore chrétien à ce moment-là, n’en revenait pas. Il répétait sans cesse : « Il n’est pas possible que vous offriez une chose pareille. C’est une blague… C’est trop pour moi. Tous mes préjugés contre vous sont écartés. Vous, les chrétiens, vous m’avez vaincu ! »

Nikolaï Schepel