Où l’haleine givre !
Depuis quelque temps nous avions le projet d’un nouveau voyage missionnaire au-delà du Cercle Polaire, dans la région qui aboutit à l’embouchure du fleuve Kolyma, dans la Mer Arctique. C’est là que plusieurs milliers de chrétiens sont morts en exil dans les années du régime soviétique (Voir le N° 94-1/2007, p. 2-5, l’article “… sur les rives de la Kolyma”). Cinq frères yakoutsk se sont aventurés sur ce chemin dangereux avec “Le Chasseur” (véhicule tout-terrain) offert par la FriedensBote. Le voyage s’est bien terminé au bout de 39 jours. Vos prières (pour les lecteurs de l’édition allemande informés préalablement) ont été précieuses, chers amis de la mission. Ce qui suit est la première partie de la description du voyage de Saïd Protopopov.
Un parcours enneigé de 6000 kilomètres sans chemin...
Le but à atteindre était certes distant d’environ seulement 2000 km à vol d’oiseau, depuis Yakoutsk, mais nous avons parcouru en tout plus de 8000 km ! Sur 6000 km, on ne pouvait s’en tenir qu’à garder le cap dans une direction donnée. Nous avons emprunté le “chemin d’hiver” (en fait, il n’y a pas de route en été) sur des marécages gelés et la glace du fleuve. Sur plusieurs centaines de kilomètres, nous avons traversé des montagnes enneigées.
Grâce aux prières, le pire a été évité. Quelques fois, pendant la nuit, la glace a cédé sur des lacs gelés ; mais, à chaque fois, nous avons pu nous dégager sans le secours d’autres hypothétiques véhicules de passage... À deux reprises, nous avons eu une crevaison. Dieu merci, dans les deux cas, il y avait un garage chauffé à une distance assez proche.
En-dessous de -50°C, il est impossible de remplacer un pneu à l’extérieur, car à cette température le caoutchouc devient dur comme de l’os. En repartant le matin dans ce froid, les pneus sont voilés sur plusieurs kilomètres avant de se réchauffer et de retrouver une certaine élasticité.
Mikaïl Philipenko, chauffeur et mécanicien accompli, avait préparé le véhicule pendant des mois pour ce voyage. Pourtant, un jour, le capot du moteur s’est détaché ; puis, c’est la fixation de la cabine arrimée à l’arrière qui a lâché. La rudesse des chemins pleins de nids de poules et les contraintes liées aux faibles températures exercées sur les pièces du véhicule, étaient excessives. Dans ces conditions il n’était pas évident de rentrer à la maison en bonne santé !
Ivan, le chauffeur frigorifié
Le troisième jour, nous avons fait une halte près d’un camion à l’arrêt. Ivan, le chauffeur attendait de l’aide depuis longtemps et il était très heureux de pouvoir poursuivre son chemin avec nous tout en se réchauffant. Il existe toujours encore des cas, dans ces contrées aux températures extrêmes, où les conducteurs périssent de froid suite à une panne de véhicule.
Nous avons beaucoup parlé de Jésus à Ivan durant les cinq heures qu’a duré le voyage. Il s’est arrêté chez une connaissance et nous nous sommes séparés en laissant à chacun un Nouveau Testament.
Des conversions à Utaya
Le petit village de Utaya compte une trentaine d’habitants et n’a ni école ni magasin. La plupart vivent dans une grande pauvreté. Jusque tard dans la nuit, nous les avons visités chez eux, leur parlant de Jésus, et chantant en yakoutsk et en russe, puis leur laissant de la littérature chrétienne.
Dans l’une des maisons, après une longue conversation, la mère Yevdokiya et ses quatre filles se sont converties. Après avoir prié ensemble, nous nous sommes séparés et nous avons repris notre route dans la nuit.
En dépit des avertissements
Au-delà du Cercle Polaire, nous avons traversé plusieurs localités du district yakoutsk de Ulus, Sredne-Kolymsk. L’une d’entre elles, le village évenk de Bérésovka, est quasiment perdu dans le désert blanc.
Avant la visite du village de Bérésovka, les gens, des régions précédemment visitées, nous avaient prévenus que les habitants étaient méchants et imprévisibles. Nous avons prié et il nous parut évident que Dieu nous envoyait aussi là.
Autrefois ces villageois traversaient la toundra avec leurs rennes de façon très libre. Pour les autorités, ils n’existaient pas. Le pouvoir soviétique ne les a “découverts” qu’après 37 années d’administration, en 1954.
Arrivés à Bérésovka, nous avons rapidement fait connaissance avec Youri, le directeur du club local. Volontiers, il mit à notre disposition le bâtiment de son club pour une soirée d’évangélisation. Dieu a manifesté sa miséricorde. Les gens écoutèrent attentivement et commencèrent à réfléchir sérieusement. En règle générale, ces gens du Grand Nord ont besoin de beaucoup de temps pour réfléchir et prendre une décision. Ils prirent volontiers les Nouveaux Testaments et les brochures que nous leur avons offerts.
« Je suis votre frère ! »
Youri nous a ensuite invités chez lui. À table, il nous a surpris lorsqu’il a dit : « Je suis votre frère ! Il y a huit ans, j’habitais en Yakoutie du sud et j’ai connu une communauté chrétienne. Quand je suis revenu dans mon village natal de Bérésovka, je voulais fonder une église.
Malheureusement, je n’étais spirituellement pas prêt pour cela. Les habitudes tenaces des villageois m’ont vite dissuadé d’entreprendre mon projet. J’ai recommencé à boire avec les autres et je me suis refroidi spirituellement ! »
Après cette rencontre, Youri a repris courage. Il veut maintenant vivre avec le Seigneur.
(à suivre)
La Friedensbote