Un dur travail missionnaire en Extrême-Orient

Le vieux minibus VW roulait depuis des heures sur les chemins de la taïga. Le passage dans les nids de poules ou les ornières secouait au point qu’on se serait cru dans un rallye. Impossible de rouler à plus de 50-60 km/h, un énorme nuage de poussière dans notre sillage.
Avec Sviatoslav Maïboroda, nous étions en route vers Pobeda (qui signifie “victoire”), un village de la taïga, distant d’une soixantaine de kilomètres de Chabarovsk, sur le fleuve Amour (frontière russo-chinoise).
Un don pour Pobeda
Envoyé par l’église d’Uzin (Ukraine) Sviatoslav – “Slava” pour les amis – se rendit à Pobeda pour la première fois en janvier 2000 avec sa femme et ses deux enfants. L’objectif était de soutenir les missionnaires dans la mise en place des activités chrétiennes auprès des enfants et des adolescents.

Pour le Nouvel An, Slava reçut en don une somme suffisante pour se rendre à Pobeda. Avec sa femme, Liuba, ils confectionnèrent quelques brochures qui relataient l’histoire de Noël, des images à colorier, des mots croisés et leur adresse. Ils prirent leurs billets à l’aéroport et se mirent en route vers l’inconnu. Quand y aurait-il un retour ? Le pilote n’en savait rien et le thermomètre annonçait –26°C !
Le pilote fut effrayé d’apprendre que le couple et les deux enfants étaient décidés à y demeurer. L’accueil au village fut très amical. Les autorités administratives ne leur donnèrent pas seulement les adresses des foyers de familles nombreuses, mais aussi un véhicule avec lequel ils purent rendre visite aux foyers sélectionnés pour y distribuer leurs cadeaux. Cette première visite permit d’établir plusieurs contacts qui se développèrent au cours de l’année. Les activités de l’été apportèrent une bénédiction toute particulière ; quelques enfants se convertirent au Seigneur Jésus, de même que quelques adultes. Ainsi naquit une petite communauté.
Huit fois la Bible en entier et trente fois le Nouveau Testament
L’exemple du couple Gena et Galia montre à quelles épreuves l’homme peut être exposé quand il a longtemps vécu à l’écart de tout accompagnement spirituel.
Depuis longtemps déjà, Gena aspirait à connaître les choses de Dieu. Il demanda une Bible et, ensemble avec sa femme, la lurent huit fois de suite. Ils lurent le Nouveau Testament au moins trente fois en entier. Au fil des lectures, ils comprirent le plan du salut de Dieu et se repentirent. Poursuivant leur lecture, ils acquirent la conviction qu’ils devaient se faire baptiser. Ne connaissant personne qui puisse le faire, ils se baptisèrent l’un l’autre. Mais, après avoir rencontré les Maïboroda, ils demandèrent à Slava de les baptiser “correctement”. A Pobeda, quand l’acquisition d’une maison fut possible, tous deux se rendirent très actifs dans les travaux de rénovation.
“Mais les enfants attendent !”
Les activités d’été sont aussi richement bénies dans le village d’Ulika. La christianisation forcée de ces populations par les tsars, au 18e siècle, ne les avait pas rendues vraiment chrétiennes : Aujourd’hui, comme hier, ils adorent divers esprits qu’ils croient apercevoir partout (animisme). Durant les premières années de leurs activités, les Maïboroda étaient reçus avec méfiance, mais dès le premier camp pour enfants les gens changèrent d’attitude.
Cependant, arrivés à Ulika, un été, les missionnaires pouvaient à peine descendre du bateau en raison des inondations. Comme il n’y avait aucun emplacement sec pour planter leur tente, ils s’apprêtaient à repartir, lorsque les dirigeants du village les retinrent, disant : « Mais les enfants vous attendent !» Durant tout cet été pluvieux, les activités se déroulèrent dans les bâtiments officiels des clubs laïcs pour enfants.
Une troupe de théâtre vint également loger là, moyennant une bonne somme d’argent. Là-dessus, l’idée vint aux autorités du village de demander de l’argent aussi aux croyants. Slava leur répondit : « Nous voulons construire nos relations sur la base d’une confiance mutuelle, non sur l’argent. » Il y eut un temps de négociation pour trouver une solution – et elle fut trouvée : les missionnaires s’engagèrent à rénover le bâtiment. Ils refirent toutes les peintures et, ainsi, eurent le droit de faire les camps durant tout l’été, économisant l’argent réclamé et laissant derrière eux un bon souvenir !
En décembre 2006, un frère consentit à se rendre à Pobeda avec sa voiture. Le voyage fut extrêmement dangereux, car il fallait conduire sur un fleuve gelé. En raison d’un hiver doux, la glace n’était pas suffisamment épaisse. A un endroit, elle commença à craquer. Reculer était impossible. La seule possibilité était d’accélérer à fond. Le Seigneur accorda sa protection et ils traversèrent indemnes. Au cours des années passées, il y avait eu plusieurs accidents mortels.

La situation de la famille Maïboroda
L’opération que Liuba devait subir dès 2004 fut reportée pour diverses raisons, notamment à cause d’un taux d’hémoglobine trop bas. Il lui fut conseiller de manger de la viande de bœuf et de boire du jus de grenade. Comment faire, vu la cherté de ces denrées ? Et pouvait-elle manger de la viande sans la partager avec le reste de la famille ?… De plus, en tant que citoyenne ukrainienne, elle n’était pas couverte par la sécurité sociale russe.
Lorsque l’état de santé de Liuba, devint critique, un médecin leur indiqua la solution : appeler une ambulance. En cas d’urgence, les médecins doivent intervenir même si le patient n’a pas de couverture sociale ! Ainsi l’opération, l’ablation d’une grosse tumeur, eut lieu fin juin 2006, grâce à la prise en charge de la mission, Messager de la Paix, de France, qui soutient partiellement cette famille. A présent, le problème semble écarté. Liuba a repris des forces.
Le couple a obtenu un permis de séjour pour cinq ans. Slava étudie à distance. Il est inscrit pour le huitième semestre en sciences économiques et sociales, permettant d’accéder à un diplôme d’Etat. Sans formation, l’accès aux internats et aux écoles devient de plus en plus difficile. Par ce moyen, Slava entre plus facilement en contact avec les enfants et les adultes, et peut poursuivre son travail missionnaire.
Que Dieu le bénisse abondamment, lui et sa famille.
Victor Martchouk