donnez-leur vous-mêmes à manger

Voyage en Kirghizie (2/2) du vendredi 5 au vendredi 12 août 2016

 (Début du compte-rendu dans le numéro précédent)

Lundi 8. Alex Janzen me parle de la Kirghizie, pays dans lequel il est né il y a 35 ans et qu’il a quitté à l’âge de 11 ans.

Jusque dans les années 30, il y avait en Chine, en bordure de la Manchourie et de la mer, une très forte colonie allemande. Quand la guerre a commencé entre la Chine et le Japon, la colonie a fui vers la Kirghizie, l’Ouzbékistan et l’Asie centrale en générale.

C’est pourquoi, nous trouvons ici des personnes d’origine allemande et coréenne.

10h30. Issa vient nous prendre pour aller chez lui.

Nous traversons la ville : épique ! Il fait, plus de 30 °C, les fenêtres de la voiture sont ouvertes. Nous respirons l’air ambiant des tuyaux d’échappement et de la poussière ! Bichkek est une ville bouillonnante comme toutes les villes d’Asie : on ne lésine pas sur le klaxon !

Après deux heures de route, nous arrivons chez Issa, accueillis par sa femme Taalaï et leurs quatre enfants.

Dans leur salon-salle à manger, la table est surchargée de victuailles – en Kirghizie, les invités sont des rois et il faut les honorer, souvent au détriment du reste de la famille !

À l’extérieur, un autre bâtiment est composé d’une grande salle à manger et d’un atelier de couture, où deux femmes travaillent à la confection d’uniformes scolaires.

Non loin de leur maison, un bâtiment sert de refuge pour mères et enfants abandonnés, avec l’aide de la FriedensBote.
Actuellement, il y a 6 mamans et 25 enfants, dont le plus jeune a 4 mois.

Dès qu’il nous voit, l’un des enfants crie “Ata” après Issa, ce qui signifie “Papa”.

Pendant le long repas, Issa et Taalaï nous parlent de leurs difficultés. Bien qu’Issa soit un ancien bandit, il s’est fait plusieurs fois tabasser par ses anciens “amis”. Dans l’un des cas, son agresseur est mort dans les heures qui ont suivi son méfait…(Ndlr: Lire plus sur sa conversion dans le numéro 120, aux pages 3 à 5).

 

Mardi 9. Issa vient nous chercher pour nous rendre chez Jacob Ens, un Kirghize d’origine russo-allemande.

Jacob Ens est marié et a trois garçons et deux filles. Après le repas, la discussion porte sur les problèmes d’églises, essentiellement sur la situation locale. Dans l’ensemble, pour le moment, c’est calme et paisible à Bichkek et dans le pays.

La conversation s’engage sur les différentes églises, leurs origines. Dès les premières années de la Révolution bolchevique, beaucoup de chrétiens ont fui vers l’Asie centrale, pensant être à l’abri… Comprenant leur erreur, un grand nombre ont fui vers les USA et l’Australie. C’est ainsi qu’il y a eu une diaspora forcée dans toute la partie asiatique de l’Empire soviétique, due en plus à la relégation et à la présence de camps de travail (Goulag).

Suite à l’embargo décrété par l’Union européenne, le président Poutine a confisqué tous les avoirs européens dans la Fédération de Russie. Il utilise aussi l’Église orthodoxe à ses propres fins. En Kirghizie, la Russie et la Turquie jouent un rôle prédominant. Il s’agit de musulmans sunnites, comme Daesh et comme en Turquie. Il y a aussi des Ismaélites et des Juifs, lesquels se font discrets. Ici, la religion musulmane est baignée de chamanisme et d’athéisme. Selon les régions, les chrétiens sont plus ou moins bien tolérés. Quand je parle des chrétiens, je n’inclus pas les orthodoxes, qui font partie du décor, car nous voyons des coupoles orthodoxes parmi les minarets des mosquées. Ils font partie du système, mais la plus grande partie de la population est musulmane, seule une petite partie est orthodoxe (5%).

Le pays est en expansion : à Bichkek, il y a beaucoup de constructions neuves. Portables, tablettes, téléphones mobiles se trouvent partout. Il y a une très bonne couverture du téléphone mobile, même avec l’extérieur du pays.

Au niveau national, le Conseil des Églises, qui rassemble l’ensemble des églises protestantes, ressemble à une “cuisine” confuse, comme partout dans le monde protestant… Hélas, on y trouve toutes les tendances…

L’église de Jacob Ens est dans la tradition baptiste russe. Avec lui, la discussion porte aussi sur les difficultés des églises de différentes dénominations : comment collaborer face à l’État… Damir participe au conseil des églises. Comme ailleurs, les rapports entre églises sont souvent conflictuels.

Mercredi 10. Vers 16 heures, Damir vient nous chercher pour nous rendre à son église.

Sur le terrain, il y a une maison occupée par un frère de l’église et sa petite famille. Il est chargé de l’entretien des bâtiments.

Au sous-sol, sont installés une bibliothèque et un bureau. Une sœur fait le secrétariat. Issa est présent, mais ne restera pas longtemps.

Trois autres frères, assez jeunes, participent à la conversation.
L’un est responsable des enfants et est guitariste, un autre a la charge des étudiants, le troisième est un ancien qui seconde Damir.
En outre, deux frères présents sont chinois – il y a également un groupe de Chinois dans l’église.

 

Avec Damir et quelques frères de l'église dont deux chinois.

Jeudi 11. C’est le dernier jour. Avec Issa, nous parlons de son travail auprès des femmes et des enfants abandonnés. Il nous annonce que ce matin un homme, qui s’est converti depuis peu, est venu rechercher sa femme et ses trois enfants.

Paul confirme à Issa le soutien de la mission pour son action auprès des femmes et des enfants. Alex lui fait signer des documents pour éviter toute controverse. La mission veut des comptes clairs pour ne pas paraître comme celle qui résout les problèmes avec l’argent seulement. Dans certaines situations, il faut se mettre devant le Seigneur dans la prière pour discerner ce qui est le plus urgent, le plus important, etc. Jésus doit rester au centre de toute action !

Paul constate également que les vrais pasteurs, qui rassemblent le troupeau et en prennent soin avec le cœur et pas seulement avec la tête, sont plutôt rares !

Vendredi 12. Damir arrive vers 2h30. Nous partons à l’aéroport. Il nous accompagne dans nos démarches. Puis ce sont les adieux.

Arrivés en Allemagne, un frère de la mission nous conduit à Meinerzhagen, où Eduard Ewert me propose de passer la nuit chez lui. Je suis accueilli par son épouse dans leur grande maison, un peu vide maintenant que leurs neuf enfants, tous adultes, l’ont quittée.

Ce soir, il y a une réunion à l’église. Je pars avec eux. Dans la salle, je suis surpris de voir qu’il y a autant de jeunes que d’aînés, environ 60 personnes – et nous sommes au milieu des vacances scolaires !

Les prières et les chants se succèdent en fonction des activités de l’église. Un groupe de jeunes est allé en Hongrie et l’un d’eux en donne un compte-rendu. Vient mon tour. Eduard (qui me sert d’interprète du russe en allemand !) me présente et je résume ce que nous venons de vivre.

Après une très bonne nuit réparatrice, je repars le samedi matin et arrive à la maison vers  19h, où, avec mon épouse Marie-Do, nous faisons monter au Seigneur notre prière de reconnaissance, pour sa protection tout au long de ce fabuleux voyage.

 

Слава Богу ! Gloire à Dieu !

Pierre Vaubaillon